Les travaux de restauration de la basilique du Sacré-Coeur par la ville de Paray-le-Monial (Saône-et-Loire) et le service des Monuments historiques ont été l'occasion pour l'Inrap de réaliser, entre 1998 et 2005, plusieurs opérations archéologiques.

Dernière modification
10 mai 2016

Ces recherches, en associant analyse du sol et étude des élévations, ont permis de renouveler les connaissances sur l'édification de l'église du prieuré clunisien de Paray-le-Monial. Le sol de l'église, à l'exception du déambulatoire, a été fouillé. 1 500 m2 de murs appartenant au croisillon nord du transept et à la nef ont également été étudiés.

 

L'église de l'an Mil

L'une des contributions majeures est la découverte des vestiges de l'église construite après 999, c'est-à-dire après la donation du prieuré de Paray-le-Monial à Odilon de Mercoeur (994-1049), cinquième abbé de Cluny.
L'église de l'an Mil était composée d'une nef unique de 20 m de longueur sur une largeur de 13,30 m, d'un transept très débordant de 28,80 m sur 8,40 m de profondeur et d'un chevet tripartite de près de 12 m de développement sur 15,50 m de large. L'abside principale, précédée d'une importante travée droite, avait un diamètre de l'ordre de 5,40 m. La structure des maçonneries indique que l'édifice était charpenté, à l'exception des absides.
La mise en place tardive, dans le dernier quart du XIe siècle,  sous l'abbatiat d'Hugues de Semur (1049-1109), sixième abbé de Cluny, d'une avant-nef de trois travées complète le dispositif liturgique de l'église monastique. Cette avant-nef à deux tours, appelée galilée dans le monde clunisien, revêt une fonction importante qui est d'accueillir la liturgie de commémoration des défunts.

La seconde église : un chantier qui s'éternise

La lente démolition de l'église de l'an Mil entraîne pour la seconde église un chantier interminable. Les ruptures de construction, les modes constructifs, les tailles de pierres, la variété des moulures et de la sculpture permettent d'établir une chronologie comportant quatre campagnes. La première coïncide avec la construction du chevet depuis les murs extérieurs vers les piliers placés à l'ouest du choeur (1). Le nouveau chevet sera raccordé pour un temps au transept du XIe siècle. La deuxième campagne permet la mise en place des premiers mètres de l'élévation du croisillon nord du transept avec son portail nord (2). L'établissement du croisillon sud et des murs de la nef de l'église s'effectue dans une troisième étape (3, 4, 5). L'implantation approximative du mur sud de la nef nécessite des rectifications complexes dans les élévations. L'avant-nef, dont l'une des trois travées est supprimée, est raccordée aux maçonneries de la nouvelle nef. L'édifice est achevé au début du XIIIe siècle (6) à un moment où l'art gothique s'affirme. Cependant les moines ont tenu à conserver l'esthétique romane mise au point sous l'abbatiat d'Hugues de Semur, qui marque l'appartenance de l'édifice au monde clunisien.

Le pavement et les installations liturgiques

Le pavement et les installations liturgiques médiévales - autels et clôtures de choeur - ont été mis en évidence à 30 cm sous le dallage de l'église. Leur état de conservation permet notamment d'en savoir davantage sur les différents chemins empruntés par les moines clunisiens lors des processions. Le pavement est composé d'un tapis de carreaux de terre cuite, de couleur jaune ou noire, qui s'organisent en chevrons ou en damiers. L'un des intérêts majeurs de ce sol se trouve dans la présence de panneaux marquant clairement des cheminements reliant les accès de l'église au grand autel de la nef et au choeur liturgique. Ce dernier englobait un ensemble composé de la croisée de transept, de la travée de choeur et du rond-point. Les motifs du sol, plus ou moins complexes, pourraient signaler une hiérarchisation des parcours en fonction de l'importance liturgique de la déambulation. Le panneau le plus ouvragé correspond au chemin menant de la galilée aux principaux autels, chemin qui était emprunté par les moines lors des processions dominicales.