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La Guyardière
La persistance des trames antiques dans le paysage mayennais à Changé, Mayenne
Le site de la Guyardière, à Changé, s'étend sur environ 600 m en rebord de plateau et domine la vallée encaissée d'un ruisseau affluent de la Mayenne. La fouille a révélé des entrelacs de fossés associés à deux sites d'habitat, l'un gallo-romain, l'autre médiéval, seulement effleurés par la fenêtre d'étude. Elle a également mis en lumière la persistance de l'organisation de l'espace datant de l'époque romaine, et qui persiste aux époques moderne et contemporaine
Trois phases d'aménagement
La première phase semble se mettre en place à la fin de l'époque gauloise (Ier siècle avant notre ère) pour se développer principalement au tout début de la période antique (Ier siècle de notre ère). Elle se caractérise, avec par des fossés rectilignes et perpendiculaires entre eux, délimitant de vastes espaces surfaces quadrangulaires (cours, parcelles agricoles...). L'habitat associé à ces espaces semble installé au nord, hors emprise de la fouille.
La deuxième phase correspond à l'abandon du site dès la fin du Ier-début du IIe siècle. Les terrains cultivés retournent en friches et en landes sauvages.
La troisième phase remonte au XIVe-XVe siècle et correspond à un repeuplement et à une remise en valeur agricole (cultures, élevage) du plateau, avec les indices d'une occupation des lieux organisée et prolongée. Le toponyme « Guyardière » renvoie clairement d'ailleurs aux grandes campagnes de défrichements de l'époque. Les fossés de délimitation attribués à cette phase définissent des petits espaces enclos ovales ou arrondis, sans doute en relation aves les modes de défrichage médiévaux (essartages en ellipse). L'habitat semble localisé sensiblement au même endroit qu'à l'époque antique.
L'évolution « en arrière » du paysage après la fin du Moyen Âge
Le site de la Guyardière continue à être occupé aux époques moderne et contemporaine, les petits enclos médiévaux s'agrandissant pour aboutir aux formes actuelles du cadastre et des parcelles. Cependant, Lles trames les plus récentes reprennent en fait l'organisation de l'espace mise en place à l'époque antique (longs fossés rectilignes perpendiculaires entre eux, orientation nord-est/sud-ouest). Pourtant, les fossés observés sur le site de la Guyardière pour la période antique ont bel et bien disparu du paysage pendant plus de treize siècles !
Pour comprendre cette « évolution en arrière », il faut avoir une vision plus large de ce territoire. Les remembrements moderne et contemporain s'appuient semble-t-il sur des éléments de structuration majeurs du territoire datant de l'Antiquité et ayant traversé les siècles. Une importante étude documentaire (fonds cartographiques anciens et actuels, archives...) permet d'émettre l'hypothèse que, à l'époque antique, la voie reliant Le Mans à Corseul (capitales de cité) passait par Changé, gué avéré sur la Mayenne où les vestiges gallo-romains abondent, et non par Laval. Selon son tracé le plus direct, cette voie pourrait alors être à l'origine du tronçon de route actuelle bordant l'emprise de la fouille de la Guyardière à son extrémité occidentale. Ce n'est qu'au Xe-XIe siècle que la voie principale se serait déplacée pour passer par Laval ; le tracé ancien a pu rester fonctionnel en voie secondaire durant le Moyen Âge, assurant la pérennisation de l'organisation spatiale antique jusqu'à nos jours.