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Pourquoi l’Europe fut-elle conquise si tard par l’Homme ?
Pour découvrir l’archéologie d’aujourd’hui, ses sciences connexes, mais aussi approcher et décrypter ce que la discipline recouvre de concepts, de modèles, Carbone 14, le magazine de l'archéologie, retrace les avancées de la recherche française et internationale et parcourt terrains, chantiers et laboratoires. Une émission à écouter chaque samedi, de 19 h 30 à 20 h sur France Culture et à réécouter sur Inrap.fr.
Avec Marie-Hélène Moncel, directrice de recherche au CNRS, laboratoire "Histoire Naturelle de l'Homme Préhistorique" au Museum national d'histoire naturelle.
Les données récentes montrent que l'Europe de l'Ouest est peuplée vers 1,4-1,2 million d’années, puis, vers 700 000 ans. Pourquoi l’est, en direction de la Chine, a-t-il été privilégié, par ces communautés humaines, au profit de l’Occident ?
Neandertal est, depuis quelques décennies, sur le devant de la scène archéologique, puisque les découvertes et avancées paléogénétiques s'enchaînent, si bien que des chercheurs ont voulu faire de Neandertal le "premier européen" ! Il n’en est rien, et il nous faut alors remonter bien plus loin dans le temps pour découvrir ses précurseurs… Peu de chercheurs travaillent sur ce sujet, il faut dire que les vestiges sont rares, pour une si longue période, les recherches ardues, le thème complexe…
Aux portes de l’Europe occidentale, il y a 1,8 million d’années, un site de Géorgie, Dmanissi, a livré cinq exceptionnels crânes, d’une grande variabilité morphologique et dénommés Homo Georgicus. Pour autant, les dernières données archéologiques montrent que l'Europe de l'Ouest est peuplée vers 1,2-1,4, tout au plus 1,5 million d’années, donc bien plus tard que le continent asiatique. Les conditions environnementales, géographiques, climatiques de l'Europe sont-elles les seuls éléments pouvant expliquer ce vide pendant près d'un million d'années, ou tout au contraire, peut-on envisager qu’un minimum de capacités intellectuelles - en un mot, de cognition - était nécessaire pour prospérer dans ces terres ?
Vers 1,4 million d’années, les premiers européens, Homo antecessor, sont présents en Italie, mais aussi en France (Vallonnet, Lusignan, Lunery-Rosières, Pont de Lavaud), tandis qu’en Espagne, le site d’Atapuerca (La Sima de los Huesos) a notamment livré un hominine vieux de 1,22 million d’années.
Vers 700 000 ans arrivent de nouveaux groupes humains introduisant une nouvelle technologie et de nouveaux outillages dont les bifaces que l'on attribue à une nouvelle culture : l'Acheuléen. Ces nouveaux occupants sont décrits sous le terme d'Homo Heidelbergensis et restent encore fort énigmatiques. Toutefois, ils semblent s'adapter à des environnements plus variés. Ceux-ci peuplent en continu le sud de l'Europe alors que le nord-ouest est dépeuplé pendant les périodes glaciaires. En Italie, le site de Notarchirico livre plus de dix phases d'occupation, couvrant un interglaciaire et un glaciaire, et permet de décrire les comportements des hominidés vivant dans le sud de l'Europe et les comparer à ceux vivant sous des latitudes plus septentrionales.
Pour aller plus loin
- Présentation de Marie-Hélène Moncel, sur le site du Muséum national d'Histoire naturelle, sur le site The Conversation (un article à lire, Connaître l'émergence de Neandertal pour comprendre sa disparition).
- Ses publications, sur Cairn.info, sur Academia, sur HAL.
- Son profil Radio France.
- Lien vers son programme de recherche Lateurope 2023-2027 (en anglais / CNRS).