Préalablement à un projet de lotissement mené par la société Foncier d’Artois, une équipe de l’Inrap a fouillé à Douvrin, rue des Martyrs, une superficie de 2,8 ha. De nombreux vestiges ont été mis au jour, datés du Néolithique, de l’âge du Fer, de l’Antiquité et de la période moderne. 

Dernière modification
03 janvier 2025

Un terroir occupé depuis le Néolithique

L’occupation la plus ancienne de ce site date du Néolithique, soit environ 3 000 ans avant notre ère. Le relief du terrain semble avoir été très différent autrefois, avec des buttes et crêtes s’élevant à plus de 1,50 m au-dessus de la surface décapée. Un écrêtage du terrain, probablement lié à la mise en culture des sols, a été opéré au fil des siècles. De grandes dépressions ont ainsi été révélées, dans lesquelles les archéologues ont observé des niveaux de sol datant du Néolithique moyen et final. Des tessons de céramique et des centaines d’artefacts en silex y ont été découverts. Les éléments lithiques (silex) sont caractéristiques des habitats du Néolithique final régional : grattoirs, haches et lames de poignard.

Douvrin4.jpg

1 : Grattoir sur lame en silex du Grand-Pressigny à dos et face inférieure polis.

2 : Fragment de lame de poignard en silex tertiaire du Bassin parisien.

3 :Silex microdenticulés.

© Emmanuelle Martial - Inrap



Une ferme de la fin de la période gauloise

L’ensemble du site est marqué par la présence d’une multitude de fossés dont plusieurs ceinturent des espaces d’habitat ou des aires d’activités agro-pastorales. Les espaces d’habitat sont caractérisés par la présence d’empreintes de bâtiments (de terre et de bois) associées à des fosses de rejets domestiques riches en mobilier (céramique, ossements fauniques…). Ils sont datés du second âge du Fer grâce au mobilier découvert dans les fossés mais également dans des vestiges tels que des foyers, puits, trous de poteau, fosses artisanales ou de rejet.

Tous ces vestiges sont les ultimes témoins de la présence d’une ferme située dans les paysages de la Gaule Belgique.


Une nécropole du Haut-Empire et les abords d’une occupation antique

Une nécropole du Ier siècle de notre ère, située le long d’un chemin antique a été mise au jour sur un espace de 130 m². Une trentaine de sépultures à incinération y ont été découvertes, conformément à la pratique prédominante durant les deux premiers siècles de notre ère. Les sépultures contenaient des ossements déposés majoritairement en coffre ; seuls trois individus ont été déposés dans des urnes cinéraires.

Cette nécropole gallo-romaine fait écho à la présence de nombreux vestiges antiques découverts au sud de l’emprise de fouille et qui témoignent de l’existence d’un site romain à proximité.


Les études de la post-fouille sur la nécropole

L’étude anthropologique du reste des défunts incinérés a apporté d’autres éclairages : chaque ensemble osseux correspond aux restes d’un seul individu ; six sépultures contiennent néanmoins les restes de plusieurs individus incinérés. Ainsi, par exemple, trois enfants de moins de 3 ans ont été placé au sein d’une même sépulture. L’hypothèse d’une épidémie pourrait expliquer la synchronicité de ces décès infantiles.

L’analyse de la céramique de la nécropole s’est portée sur plus de 150 poteries souvent intactes, réparties dans une trentaine de tombes et dont les dépôts sont souvent complets. L’étude a notamment permis de mettre en évidence l’utilisation différenciée des modules de vases en fonction de l’âge du défunt, des pratiques importantes de mutilations sur les poteries, des pratiques libatoires, une préférence pour les vases à boire…

Ces différentes études ont permis de consolider les connaissances archéologiques sur les pratiques funéraires dans les Hauts-de-France et d’appréhender les apports d’une influence double d’une nécropole située à la frontière entre deux cités gauloises, entre les Nerviens et les Atrébates.


Les dernières études

L’étude de la céramique provenant de l’ensemble du site est presque terminée ; elle permettra d’affiner la date de création et d’abandon de la ferme gallo-romaine.

Des analyses C14 permettront de dater certaines structures stériles en mobilier archéologique, notamment une structure de chauffe atypique (four ou foyer domestique) qui, dans sa conception, montre que le recyclage est une pratique prisée depuis des siècles. Sur les parois de la structure sont plaqués de nombreuses scories et culots de forge, des résidus de la structure de combustion utilisée par le forgeron. Le fond de la structure est quant à lui tapissé de deux fragments de meule et d’une molette datant du Néolithique moyen et final. Cette structure est donc constituée d’un assemblage diachronique original.

Aménageur : SARL FONCIER d'ARTOIS
Contrôle scientifique : Service régional de l’Archéologie (Drac Hauts-de-France)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Bruno Vanwalscappel, Inrap