Fermé depuis mars 2020, en application des mesures sanitaires, le Point Éphémère a souhaité mettre à profit cette fermeture en documentant sa salle de concert, devenue provisoirement un site archéologique. Des archéologues de l’Inrap et des étudiants des Beaux-Arts de Paris se sont associés à lui en vue de réaliser un projet d’art centré sur l'« archéologie du présent ».

Dernière modification
16 juillet 2021

Situé au 200 quai de Valmy, à Paris, dans le 10e arrondissement, Point Éphémère est depuis 2004 un centre artistique qui s’est surtout fait connaitre par sa scène dédiée aux musiques actuelles. Cette salle de concert « debout », totalement hermétique du fait de son isolation phonique, est fermée depuis le 13 mars 2020, suite à une décision du Préfet en application des mesures sanitaires. Souhaitant dans ce contexte lancer une réflexion sur l’usage et le fonctionnement des salles de concert, qu'une routine facile et légère nous faisait oublier, Point Éphémère s’est tourné vers l’Inrap et les Beaux-Arts de Paris, en vue de réaliser un projet d’art et d’« archéologie du présent » centré sur l'espace et le fonctionnement de la salle de concert. 

 

Une « Pompéi du spectacle vivant »

Vide et laissée à l’abandon, cette salle de concert est donc devenue provisoirement une « Pompéi du spectacle vivant ». Si le concept « salle de concert » ne soulève pas de difficulté a priori, l’étude archéologique de son architecture, mais aussi de sa culture matérielle (ses équipements), comme de ses traces d’usage les plus fugaces, permet d’identifier un modèle singulier d'espace dont l'agencement, par-delà la scène placée sous les regards, produit le spectacle et l'usage.  Ce projet d'archéologie du présent s'est notamment arrêté sur une analyse réciproque du dispositif de spectacle et de spectatio (ce qui équipe autant la production du spectaculaire que la vision et l'audition), des différents espaces et éléments d'architecture connexes à la salle de concert (entrée, loge, coursives, toilettes) et sur une analyse des usages, de la manière dont ce lieu et des éléments matériels ont déterminé des stations, des déambulations, du logement, mais encore des modes d’expression « urbains », comme les graffitis ou les stickers, dont le Point Éphémère présente un riche échantillonnage.

Une modélisation en 3D d’une salle de concert

Le projet d’archéologie au Point Éphémère a pris la forme d’une modélisation en 3D permettant aux spectateurs de circuler librement au cœur de la salle et de ses annexes et de s’arrêter sur quelques-uns de ses points d’intérêt. Un topographe de l’Inrap, Mehdi Belarbi, spécialiste de la photogrammétrie, a réalisé cet environnement numérique, en collaboration avec, Gilles Bellan, un archéologue spécialiste des périodes contemporaines. Ce dispositif est complété par un état des lieux réalisé par les étudiants Hugo Bonnet (3e année) et Lalie Thebault Maviel (5e année) de l’atelier Julien Sirjacq des Beaux-Arts de Paris : photographies centrées sur des micro-détails et des traces d’usage (graffitis, usures, raclages, ajouts…), bande son et sélection de documents d’archive. Des textes produits par une « praticienne du lieu » et un « archéologue », accompagnent ce dialogue entres arts et archéologie.

anim.jpeg



Art et archéologie : un dialogue fécond

En novembre 2019, Dominique Garcia, président de l’Inrap, et Jean de Loisy, directeur de l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris, ont signé un accord cadre favorisant la connaissance de l’archéologie préventive par la création contemporaine.
Un partenariat de mobilité étudiante avec l'Inrap et les Beaux-Arts de Paris, initié en 2021, permet à des étudiants de se rendre sur un chantier d’archéologie préventive en outre-mer en tant qu’observateurs actifs au sein d’une équipe de recherche, afin de nourrir leur réflexion et leur pratique dans un contexte non-artistique. Le projet d’archéologie au Point Éphémère est une nouvelle illustration de ces échanges, dans le contexte troublé de la crise sanitaire.
 

Toilettes, mur repeint, 19 janvier 2021.
Point Éphémère
Point Éphémère est un centre de dynamiques artistiques ouvert en 2004 par l’association Usines Éphémères qui investit des lieux en déshérence pour mener à bien une proposition artistique et culturelle. Les objectifs de Point Éphémère, en lien avec la Mairie de Paris, sont le soutien à la jeune création en proposant aux artistes des espaces de travail et la diffusion de la scène émergente pour favoriser sa rencontre avec le public. Ouvert à tous et toutes dans leurs différences et leurs singularités, Point Éphémère, c’est un esprit alternatif, indépendant et festif qui fait de lui un acteur culturel important de la capitale.
Les Beaux-Arts de Paris
Les Beaux-Arts de Paris sont à la fois un lieu de formation et d’expérimentations artistiques, d’expositions et de conservation de collections historiques et contemporaines et une maison d’édition. Héritière des Académies royales de peinture et de sculpture, placée sous la tutelle du ministère de la Culture, l’École a pour vocation première de former des artistes de haut niveau. Elle occupe une place essentielle sur la scène artistique contemporaine.
Conformément aux principes pédagogiques qui ont toujours eu cours aux Beaux-Arts, la formation y est dispensée en atelier, sous la conduite d’artistes de renom. Cette pratique d’atelier est complétée par une palette d’enseignements théoriques et techniques qui ont pour but de permettre aux étudiants une diversité d’approches. Les Beaux-Arts de Paris, ancrés dans la réalité économique et sociale, se donnent également pour mission de créer des passerelles entre la vie étudiante et la vie professionnelle, notamment en initiant leurs étudiants au monde de l’art et en favorisant les rencontres avec ses acteurs.