Les archéologues de l'Inrap fouillent le bourg actuel de Rezé, ainsi que les aménagements des rives du Seil, un ancien bras de la Loire. Une nouvelle fenêtre s'ouvre sur l’agglomération antique de Ratiatum et son évolution au Moyen Âge.

Dernière modification
23 septembre 2020

L'Inrap mène actuellement une fouille préventive dans le centre bourg de Rezé (Loire-Atlantique). Prescrite par la Drac des Pays de la Loire (service régional de l’Archéologie) qui en assure le contrôle scientifique, sur une surface d’environ 480 m2, l’opération intervient en amont du projet immobilier Carré Daviais porté par Bati-Nantes. Elle a déjà livré de nombreux vestiges antiques et médiévaux.

Aménagements de berge, maçonneries, rue, chapelle, témoignent de l’urbanisation du quartier dès la première moitié du Ier siècle de notre ère, en lien avec le développement de l’agglomération antique Ratiatum et son évolution.  À l’occasion des prochaines Journées européennes du Patrimoine (19-20 septembre), des visites guidées du chantier de fouilles seront proposées au public. Des visites pour les scolaires auront lieu le vendredi 18 septembre.

Des aménagements de bord de Loire, des bâtiments et des espaces de circulation

La fouille en cours vise à étudier les occupations antique et médiévale sous le bourg actuel de Rezé, ainsi que les aménagements des rives du Seil, un ancien bras de la Loire. L’opération se situe dans le périmètre de l’agglomération antique de Rezé (Ratiatum), dont elle vient compléter le plan des vestiges. Les premières investigations ont permis de mettre au jour des aménagements de berge similaires à ceux fouillés sur le site de Saint-Lupien, un quartier portuaire et commercial de la ville antique, distant d’environ 400 mètres. Les aménagements portuaires de Saint-Lupien, se présentaient sous la forme d’un quai, d’un mur de berge et de plates-formes techniques construites en caissons de poutres de bois et dalles de schiste. Ceux de la fouille actuelle, également organisés en terrasse, semblent en constituer le prolongement et paraissent recourir aux mêmes procédés de construction. Ils sont bordés par un bâtiment antique avec un sol en béton surmonté de pilettes en terre cuite caractéristiques d’une pièce chauffée en sous-sol (système d’hypocauste).

Un autre vaste édifice au sol dallé, plus tardif, pourrait correspondre aux soubassements d’une ancienne chapelle. Plusieurs indices permettent de supposer qu’il s’agit probablement de la chapelle Saint-Symphorien décrite au début du XVIIe siècle et encore distinguable sur le cadastre de 1826. L’édifice religieux est bordé par une rue empierrée ou calade, constituée de galets et pourvue de petites rigoles permettant l’évacuation de l’eau ainsi que d’un escalier. La partie la plus basse du site, à proximité du cours d’eau (ancien lit du Seil), a fait l’objet de plusieurs remblaiements, permettant des constructions et occupations plus tardives, dont la fouille s’attachera à préciser la chronologie.

De Ratiatium à Rezé

L’opération en cours se déroule à proximité du site d’une fouille programmée entre 2005 et 2016, qui a révélé les vestiges du port antique de Saint-Lupien, au sein de l’agglomération antique de Rezé (Ratiatum). Elle est par ailleurs localisée au cœur du vieux bourg à proximité de l’église Saint-Pierre, dont la reconstruction au XIXe siècle avait révélé de nombreux vestiges antiques : des mosaïques et des bâtiments imposants dotés de salles chauffées suggérant l’existence de thermes publics, un laraire (petit autel destiné à abriter des figurines de divinités protectrices du foyer) et un atelier lié au travail de l’argent et du bronze. Des fouilles plus récentes, parmi lesquelles celles liées à la construction de la mairie en 1986, ont confirmé l’urbanisation antique du quartier avec la découverte d’un four de potier daté du Ier siècle ainsi que des vestiges d’habitat. Une partie de la ville décline ensuite au cours des IIIe et IVe siècles, avant de connaître un renouveau aux Ve-VIe siècles, comme en témoigne la construction d’une importante basilique paléochrétienne découverte rue F. Marchais.

Détail d’une coupe

Détail d’une coupe

 

© Marie-Laure Hervé-Monteil, Inrap

Les diagnostics et fouilles réalisés aux abords de l’église Saint-Pierre par le pôle de recherche archéologique de Nantes Métropole ont confirmé l’importance des aménagements antiques au centre du bourg actuel et permis de mettre au jour des sépultures en sarcophage datées du haut Moyen Âge. La fouille en cours s’inscrit dans le prolongement de ces recherches et ouvre une nouvelle fenêtre sur ce secteur de la ville antique et son évolution au Moyen Âge. Elle permettra de restituer les aménagements des anciennes berges et leurs transformations, d’appréhender les relations hommes-milieux dans ce contexte de développement urbain, complétant les connaissances sur l’histoire de Rezé.

Rue empierrée (calade)

Rue empierrée (calade) 

 

© Camille Lavenu, Inrap

 

 

Maîtrise d’ouvrage : Bati-Nantes
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Pays de la Loire)
Recherche archéologique : Inrap
Directrice adjointe scientifique et technique : Hélène Jousse, Inrap
Responsable scientifique : Marie-Laure Hervé-Monteil, Inrap