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Des informations inédites sur l’histoire de Buzançais
À l'occasion de la réhabilitation du centre-ville de Buzançais, l'Inrap a mené une opération d'archéologie préventive touchant plusieurs monuments de la ville historique, la motte castrale, l’ancienne église Saint-Honoré, l’enceinte urbaine et les jardins du château comtal. Le passé de la ville ressurgit.
Avant la ville
Quelques structures mises au jour témoignent d’une occupation ancienne, entre l’âge du Bronze et La Tène Ancienne (au plus tard au Ve s. avant notre ère). Le site est ensuite abandonné et mis en culture jusqu’aux premières installations médiévales. Aucun vestige structuré gallo-romain n’a été découvert, confortant l’hypothèse du déplacement des pôles de peuplement. Les principaux habitats du territoire durant l’Antiquité seraient en effet situés aux lieux-dits Saint-Étienne et Herbigny, où se sont maintenus les centres des principales paroisses jusqu’à la fin de la période moderne.
Aux Xe-XIIIe siècle, une occupation périphérique à la motte féodale
À partir de la seconde moitié du Xe siècle, les vestiges mobiliers et les structures archéologiques témoignent d’une importante occupation médiévale. Une couche charbonneuse, épaisse jusqu’à 15 cm, a ponctuellement été observée dans plusieurs zones du site. Ce niveau est situé directement sur le terrain naturel et date de la seconde moitié du Xe siècle. Sa nature n’est pas établie (incendie, brûlis de la végétation en place avant l’aménagement du site ou remblai spécifique chargé en charbons de bois ?). Cette période se caractérise aussi par un apport massif de remblais, certainement précédé de décaissements partiels. L'étendue et l'épaisseur variable de ces terrassements suggèrent la création d’une plate-forme destinée à recevoir les premières occupations.
L’occupation domestique
Une occupation domestique dense se développe dans la partie sud du site. Datée entre les Xe et XIIIe siècles, elle est contemporaine ou immédiatement postérieure aux travaux de terrassement. Il s’agit pour l’essentiel de structures excavées, caractéristiques de cette période (fosses, fossés et silos à grains) et de vestiges de construction où manquent les éléments structurants pour documenter la topographie du site. Il pourrait s’agir d’une occupation liée à la motte castrale et à la place forte médiévale, comme une basse-cour, ou encore de la première occupation urbaine du site.
l’église Saint-Honoré et l’occupation funéraire
Les opérations ont apporté peu d’information sur l’ancienne église Saint-Honoré, détruite en 1944, et son cimetière mais le pôle ecclésial est documenté par les textes. Une sépulture a été mise au jour le long de l’église. L’inhumation est contemporaine des premières phases de l’occupation domestique et une datation radiocarbone suggère que le décès est survenu entre 776 et 971. Il s’agit d’un homme âgé de 30 à 60 ans dont le crâne présente un traumatisme circum-mortem (intervenant quelques temps avant ou après la mort du sujet, sans que l’on ne puisse assurer qu’il s’agit de la cause du décès) et d’autres incisions peu ou non cicatrisées. Ces éléments sont attribués à un accident ou plus probablement à des violences interpersonnelles. Le corps a été déposé dans un contenant étroit avec un couteau dans un étui. Ces éléments invitent à s‘interroger sur le statut social de la personne inhumée. Cette sépulture se présente comme isolée, sans que l’on sache si elle l’est vraiment ou si elle témoigne des premières phases d’occupation du cimetière situé autour de l’église et connu par les textes à la période moderne.
Vue générale du site, à l’est de l’ancienne église Saint-Honoré aujourd’hui détruite et située sous l’actuel hôtel-de-ville. L’extrémité sud de la tranchée (à gauche sur la photographie) correspond à l’emplacement supposé de l’enceinte médiévale et de son fossé.
Jean-Philippe Chimier, Inrap
Fouille des premiers niveaux archéologiques du Moyen Âge (Xe siècle). À droite, les structures en creux qui caractérisent cette occupation : fosses, trous de poteaux et silo à grain.
Jean-Philippe Chimier, Inrap
Fouille en cours d’un silo médiéval.
Jean-Philippe Chimier, Inrap
Fouille en cours de la sépulture F3, datée entre 776 et 971 par analyse radiocarbone.
Jean-Philippe Chimier, Inrap
La ville depuis le bas Moyen Âge
Aucun vestige d’habitat n’a été découvert pour la période postérieure aux XIIe-XIIIe siècle. Cette absence s’explique certainement par une modification profonde de l’occupation des lieux à cette époque. Le bas Moyen Âge est en effet marqué par un évènement majeur : l’édification de l’enceinte urbaine. Si cette dernière reprend les éléments de fortification plus anciens de la place forte médiévale, elle induit une modification majeure de la topographie de Buzançais et sans doute de la nature de l’occupation des lieux. À compter de ce moment, le caractère urbain du site ne fait plus de doute. Les murs de la ville conduisent à une densification de l’occupation intra-muros et peut-être à un abandon du secteur péri-urbain voire à l’interdiction de son occupation ce qui expliquerait l’absence de vestiges dans les sondages.
Proposition de restitution du tracé des trois principaux états de fortification de Buzançais d’après les vestiges architecturaux, les documents d’archive et les vestiges archéologiques reporté sur le cadastre de 1826, section C1 (Archives départementales de l’Indre, 3 P 249/03).
Véronique Chollet, Inrap
L’étude du plan cadastral de 1826 montre un axe parcellaire fort, constitué du mur sud de l’église et de celui des bâtiments qui la prolonge à l’est : il pourrait s’agir du tracé de la partie méridionale de l’enceinte urbaine médiévale . Les remblais reconnus le long de son côté sud pourraient correspondre au comblement du fossé de l’enceinte qui double le mur. La première intervention d’archéologie préventive réalisée en 1998-1999 place du Général de Gaulle a montré que sa partie orientale a été remblayée à la fin du XVIIIe s. Il est possible que le comblement du fossé soit intervenu après 1780-1787, au moment des aménagements urbains qui ont conduit au transfert du cimetière hors de l’agglomération.
La deuxième modification de ce secteur de la ville est la construction du château comtal et l’aménagement de ses jardins réalisés, après 1531. Ces travaux s’accompagnent de terrassements et d’un remblaiement partiel du site, observé dans une partie des tranchées. Une couche correspondant à l’ancienne terre végétale des jardins du château comtal marque la partie sud de l’emprise. Plusieurs aménagements ont été reconnus : des fosses interprétées comme des plantations d’arbres et une canalisation en briques destinée à évacuer ou acheminer de l’eau vers une installation du jardin.
À partir de 1787 et le premier pavage des rues autour de l’église, le secteur est très régulièrement affecté par des travaux d’urbanisme ayant eu pour effet la destruction d’une partie des niveaux archéologiques, en particulier autour de l’église.
Recherche archéologique : Inrap
Responsable de la recherche archéologique: Jean-Philippe Chimier