Émissions de radio
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Mis à jour le
07 octobre 2021
Collection
Carbone 14

Pour découvrir l’archéologie d’aujourd’hui, ses sciences connexes, mais aussi approcher et décrypter ce que la discipline recouvre de concepts, de modèles, Carbone 14, le magazine de l'archéologie, retrace les avancées de la recherche française et internationale et parcourt terrains, chantiers et laboratoires. Une émission à écouter chaque samedi, de 19 h 30 à 20 h sur France Culture et à réécouter sur Inrap.fr.

La Préhistoire a ses histoires ! Le magazine d’archéologie de France Culture évoque celle d’un mystère qui mélange le Périgord, la Seconde Guerre mondiale, la Russie et les temps antédiluviens, celle aussi d’une femme, aujourd’hui disparue, pour laquelle aucun avis de recherche n’a encore été lancé.

Avec Laurent Klaric, préhistorien, chargé de recherche au CNRS, spécialiste de la technologie de la pierre taillée.

Carbone 14, le magazine de l'archéologie, France Culture, le samedi de 19h30 à 20h 
Par Vincent Charpentier
Émission du 18 septembre 2021
Moulage de la Vénus de Berlin de l'époque gravettienne

Moulage de la Vénus de Berlin de l'époque gravettienne

Crédits : © DR Musée d'Aquitaine

Au cœur de la Dordogne : le site préhistorique de Laussel

Le site de Laussel, à Marquay en Dordogne, est mondialement connu par la découverte, au tout début du XXe siècle, de plusieurs bas-reliefs sculptés attribués à la culture Gravettienne, vers 25 000 - 22 0000 ans. Si la Vénus à la Corne est la figure la plus célèbre du site, quatre autres bas-reliefs sont présents : le chasseur, la femme à la tête quadrillée, la carte à jouer, et enfin « la Vénus de Berlin ».

Les fouilleurs sur le site de Laussel en Dordogne

Les fouilleurs sur le site de Laussel en Dordogne

Crédits : © Archives Lalanne-Musée d'Aquitaine

A propos du site de Laussel : il s'étend de la paroi de l'abri à La Beune, la rivière qui passe en bas, à plus de 20 mètres où l'on trouve des vestiges archéologiques, donc, c'est un site énorme, colossal, fouillé (dans les années 1900) en à peine six ans (pas en permanence) par une équipe de six à sept fouilleurs. Un cubage extrêmement rapide et extrêmement violent avec des méthodes de fouille en sape (creusement d'un tunnel). C'est impensable aujourd'hui !
La Vénus de Laussel dite "Vénus à la corne"

La Vénus de Laussel dite "Vénus à la corne"

Crédits : © DR Musée d'Aquitaine

La Dame de Berlin kidnappée ?

Détournée par le contremaître de la fouille, Raymond Peyrille, la « Vénus de Berlin » est maquillée puis frauduleusement vendue, en 1912, au Volkerskunde Muzeum de Berlin (futur Museum für Vor-und Frühgeschichte). Jamais celle-ci ne fut restituée par l’Allemagne, malgré des demandes par voies légales et diplomatiques, avant comme après la Première Guerre mondiale.

A l'époque, les biens archéologiques et culturels n'étaient pas protégés de la même manière qu'ils le sont aujourd'hui. Le commerce des antiquités était florissant, et la Dordogne était une espèce d'eldorado. Pour cela, il y avait des sites partout. Il suffisait de se baisser pour ramasser des œuvres et des silex. [...] Mais la Vénus de Berlin, elle, a été détournée par le contremaître de la fouille, qui était Raymond Peyrille et revendue frauduleusement en secret en Allemagne. Elle a atterri au musée de Berlin.
La Vénus de Berlin sous lumière naturelle

La Vénus de Berlin sous lumière naturelle

Crédits : © archives Lalanne-Francis-Chabeaud

C'est  une pièce qui a été payée rubis sur l'ongle par le musée de Berlin. Elle est proposée d'abord à Bonn, au professeur Max Verworn, qui, malheureusement, n'a pas les fonds pour la faire acquérir et qui la propose au musée de Berlin. C'est 15 000, 18 000 francs or. Ça représente à peu près 60 000 euros aujourd'hui, donc c'est une vraie fortune à l'époque.

Dans le cadre de la reprise de l’étude des collections du site de Laussel, Laurent Klaric mène, aujourd’hui, l’enquête. Pour nombre de chercheurs, la Vénus aurait été détruite dans le terrible bombardement du musée de Berlin, le 3 février 1945. Comme les fameux « Monument men » des troupes américaines, maints spécialistes russes d’Histoire de l’Art ont accompagné l’armée rouge dans la prise de Berlin, en 1945. Nombres de trésors furent ainsi saisis puis acheminés en URSS. C’est notamment le cas du « crâne du Moustier » mais aussi de l’extraordinaire « trésor de Priam » découvert par H. Schliemann. Ainsi, le trésor de Priam fut retrouvé dans une cave secrète du musée Pouchkine, mais il fallut dix ans d’enquête de la part de quelques chercheurs pour exhumer le secret et amener le gouvernement russe et la direction du musée à reconnaître le fait. Qu’en est-il pour autant de la « Dame de Berlin » ?

(A propos de la Vénus de Berlin) On sait qu'elle est probablement partie dans une caisse, en camion, en direction de la Russie. En période de guerre, ou en tout cas en fin de guerre, il a pu arriver énormément de choses. On sait aussi qu'à la chute de l'Union soviétique, tout s'est libéralisé un peu vite. [...] Peut-être que certains dépôts ont aussi été pillés et que ces pièces ont pu se retrouver dans des collections privées. [...] C'est extrêmement difficile de mener des enquêtes. La Russie est un pays où il faut faire attention quand on pose des questions sur ces biens confisqués.
Bâtiment Martin Gropius à Berlin ayant abrité le musée de la préhistoire et de la protohistoire (de 1922 à 1948), détruit par des bombardements.

Bâtiment Martin Gropius à Berlin ayant abrité le musée de la préhistoire et de la protohistoire (de 1922 à 1948), détruit par des bombardements.

• Crédits : © SMB - PK/MVF

Avec Laurent Klaric, préhistorien, chargé de recherche au CNRS, spécialiste de la technologie de la pierre taillée.

Traditionnellement, on parle des Vénus, dans le Gravettien, parce que c'est là où il y en a probablement le plus. On connaît d'autres représentations féminines postérieures, dans le Magdalénien, notamment en Europe centrale, mais elles sont différentes. On en trouve aussi des prémices dans l'Aurignacien, période qui précède le Gravettien (environ - 35 000 ans à peu près). Ce qui est intéressant, c'est qu'elles n'ont pas la même forme, exactement, mais elles ont parfois des éléments communs.

Pour en savoir plus

Année :
2021
Durée :
29 min
Réalisation :
France Culture
Production :
© Radio France
Année :
2021