L'Empire romain est une mosaïque : chaque peuple y est intégré avec son histoire, sa culture et sa religion. Si la religion romaine affiche une vraie tolérance à l’égard des autres cultes, ceux-ci ne doivent pas menacer l'unité de l'Empire, intimement liée à la religion officielle et au culte impérial.

Mis à jour le
02 décembre 2016

Avant la Conquête, les Gaulois possèdent un panthéon foisonnant et complexe, dont nous ne connaissons que peu de chose. Les représentations gallo-romaines nous en livrent quelques images et quelques noms, prouvant que ces dieux continuent à être vénérés aux côtés des nouveaux dieux romains.
Les divinités animales gauloises, Cernunnos, le dieu à ramure de cerf, et Tarvos Trigaranus, le taureau aux trois grues, sont présentes sur plusieurs bas-reliefs découverts dans des temples gallo-romains. Quelques grandes divinités comme Epona, déesse des cavaliers, et Taranis, équivalent de Jupiter, sont adorées dans toute la Gaule romaine.

Certaines sont même assimilées aux dieux romains, constituant un panthéon gallo-romain dans lequel Mercure, Mars, Hercule, Apollon et Vulcain, dotés de nouvelles attributions, sont particulièrement populaires. Un type de fusion que l’on nomme « syncrétisme ».

L’association de dieux gaulois et de dieux romains, qui mêle intégration de la religion romaine et fidélité aux cultes indigènes, est par là même un symbole de la romanisation.

Le culte officiel de Rome, introduit en Gaule, cohabite par ailleurs avec le culte voué à l’Empereur Auguste.

Les Gallo-Romains vont même jusqu’à adopter certains dieux orientaux, la liberté de culte étant autorisée dès lors que l’on pratique le culte officiel lors des grandes fêtes annuelles qui lui sont liées.

Le fanum

Le fanum est un temple gallo-romain typique. Il est inspiré des temples celtiques originellement en bois, qui se sont peu à peu monumentalisés et ont été construits en pierre et en maçonnerie.

Les fanums sont présents dans toute la Gaule romaine : dans les villes, les campagnes, mais aussi dans certaines villae, ou même dans de riches propriétés ou maisons privées.

 la partie centrale ou cella, la demeu
Vue aérienne oblique du fanum carré (15 m de côté) en cours de fouille, Ier -  IIe s. de notre ère, Neuville-sur-Sarthe (Sarthe), 2010.
On distingue les différents éléments constitutifs d’un sanctuaire celto-romain : la partie centrale ou cella, la demeure du dieu, est ceinte d’une galerie de circulation, qui accueillait les pèlerins. Ce fanum est ouvert à l’est, en direction du soleil levant.
© Hervé Paitier, Inrap

Cet édifice possède une cella, le plus souvent carrée, mais parfois ronde ou rectangulaire : cette pièce centrale, où trône la statue du dieu, est entourée d'une galerie qui pouvait servir à la déambulation des fidèles.

Le fanum est généralement entouré d’une enceinte qui délimite l'espace sacré. Dans ce périmètre, il n’est pas rare de trouver d’autres temples ou chapelles conçus sur le même modèle et voués chacun à un dieu différent.

Le Pilier des Nautes

Le Pilier des Nautes est une colonne monumentale gallo-romaine érigée en l'honneur de Jupiter par les Nautes de Lutèce au Ier siècle, sous le règne de l'empereur Tibère. Les quatre blocs ou autels qui la composent ont été mis au jour dans les fondations de l'autel de la cathédrale Notre-Dame de Paris le 16 mars 1711.

Le pilier, haut de cinq mètres, était constitué de quatre dés de pierre, disposés sur un socle et ornés de bas-reliefs sculptés sur les quatre faces. Y sont représentés, pour le panthéon latin : Jupiter, portant la foudre, accompagné de l'aigle, Mars, le guerrier, cuirassé et armé, le forgeron Vulcain, Mercure, protecteur du commerce, Fortuna, déesse de la chance, Vénus, déesse de la fécondité, et les dioscures Castor et Pollux, patrons de la cavalerie. Et pour le panthéon gaulois : Esus, Smertrios, Tarvos trigaranus et Cernunnos.

La découverte exceptionnelle d'un sanctuaire monumental antique

Un sanctuaire antique a été mis au jour en 2014 à Pont-Sainte-Maxence (Oise) d’une superficie de 1,6 hectare. Une découverte exceptionnelle par le caractère remarquable de la statuaire, sans équivalent dans toute la Gaule romaine.

Ce sanctuaire est entouré d’une enceinte de 70 m x 105 m. Au centre, la cella, puissante plate-forme maçonnée, est accessible par un escalier. Elle constitue le cœur du sanctuaire où était érigée la statue d’une divinité.

L’entrée du sanctuaire se faisait par une façade monumentale de près de 10 m de haut sur 70 m de long, percée d’une série de 13 à 17 arcades surmontées d’un entablement et d’une frise d’attique qui évoque davantage le vocabulaire architectural des arcs triomphaux.

Quelques décennies après son érection, la façade s’effondra presque d’un seul tenant, provoquant un chaos de milliers de blocs et de fragments que les archéologues étudient pour restituer progressivement l’aspect originel du monument. L’ornementation, parfois rehaussée de couleurs, révèle une profusion de décors sculptés : méandres à la grecque, rinceaux, animaux, canthares, personnages sur culots d’acanthes…

Au sommet de la façade, un des éléments les plus remarquables montre un décor de têtes monumentales (3 fois grandeur nature) aux chevelures complexes, et dont les yeux étaient à l’origine incrustés de pierres colorées. Parmi elles, une tête de Jupiter-Ammon aux cornes de bélier. D’autres dieux et déesses, encore indéterminés, alternent avec des griffons assis aux ailes déployées.
 

Une statuette de divinité gallo-romaine à Orléans

La fouille menée au Nord-Est d’Orléans a révélé un sanctuaire de source gallo-romain, situé à 3 km au nord-est de la ville antique. D'après une inscription découverte au XIXe siècle, ce lieu sacré était dédié à la déesse Acionna. Le site a livré une remarquable statuette de divinité, renseignant sur le culte jadis pratiqué.

Sculptée dans le calcaire, cette statuette mesure une quinzaine de centimètres de haut. Bien que la tête soit manquante, on reconnaît aisément une figure féminine assise dans un fauteuil. Elle est vêtue d'une tunique que recouvre en partie une sorte de manteau.

Il peut s’agir soit d’une déesse mère, soit d’une Abondance.

Un temple antique sous le couvent des Jacobins à Rennes

Le site du couvent des Jacobins à Rennes a livré de nombreux vestiges gallo-romains, dont un temple du IIIe siècle de notre ère

Ces 8 000 m2 de fouille ont offert l’opportunité d’étudier l’ensemble d’un îlot de l’antique Condate. Délimité par quatre voies, ce quartier a connu un important développement entre le Ier et le IVe siècle de notre ère. Sur près de 2 mètres d’épaisseur, les fouilles ont dévoilé une accumulation de voies, murs, et autres bâtiments. Découverte inattendue, dans la cour nord du couvent les archéologues ont mis au jour un carrefour majeur de la cité, au milieu duquel se dresse un temple. Il s’agit d’un bâtiment quadrangulaire sur podium, de 9 mètres de long, flanqué d’un escalier. L’exhumation, non loin de là, de deux statuettes représentant un coq et un bouc, pourrait évoquer une dévotion à Mercure. En effet, le dieu du commerce, des voyageurs et des carrefours trouverait parfaitement sa place dans ce quartier très fréquenté, riche en activités artisanales et commerciales.


Un sanctuaire dédié au dieu Mithra à Angers

Le culte de ce dieu, originaire de Perse, a été rapporté par des légionnaires menant campagne en Arménie sous le règne de Néron. Il se répand dans l’Empire à partir de la fin du Ier siècle, colporté par les militaires et les marchands. Le culte et ses rites initiatiques (banquets, sacrifices…) se pratiquent dans de petites chapelles voûtées, qui symbolisent la caverne originelle de Mithra.

De fortes similitudes avec certaines pratiques monothéistes, telles que l’eucharistie ou le baptême, ont fait de ce culte l’ennemi du christianisme. C’est pourquoi, après l’interdiction des cultes païens par l’empereur Théodose en 392, les chrétiens s’acharnent à détruire les lieux de culte mithraïque.

Sur 9 000 m², le site de l’ancienne clinique Saint-Louis à Angers a révélé les vestiges d’un sanctuaire voué au culte de Mithra.

Diverses inscriptions ainsi que des ex-voto ont été mis en évidence sur des vases en céramique. Plusieurs fragments comportent le nom du dieu Mithra, ou la fameuse locution « Au dieu invaincu ».