Dans la commune de Magalas, la colline de Montfo est connue depuis le début du XXe siècle pour abriter les vestiges d'un oppidum important, fréquenté depuis le premier âge du Fer (VIIIe siècle avant notre ère) jusqu'aux lendemains du changement d'ère. Suite à des fouilles qui avaient dégagé en 2013 un important sanctuaire public du Ier siècle de notre ère, l'Inrap vient de mettre à jour un espace funéraire du Ve siècle avant notre ère  et un établissement agricole périurbain de la période romaine.

Dernière modification
19 mars 2021

Préalablement à la construction d’un lotissement sur le site dit « Les Hauts de Montfo » à Magalas par la société GGL Aménagement, une fouille archéologique a été prescrite par les services de l’État (DRAC Occitanie). Réalisée par l'Inrap, elle a permis de mettre au jour les vestiges d’un enclos funéraire protohistorique datant des VIe-Ve siècles avant notre ère jusqu’alors inédit et d’un établissement agricole antique.

 

L'oppidum de Montfo

Les recherches archéologiques menées par le passé ont révélé de nombreuses occupations anciennes sur le territoire de Magalas. Au milieu du XIXe siècle, une agglomération gauloise, plus connue sous le nom d’oppidum de Montfo, est mise au jour. Des fouilles sont réalisées à partir des années 1930 et jusque dans les années 1980, notamment par les époux Bacou, résidents de Magalas. Elles ont progressivement permis de préciser la chronologie de l’occupation de cette agglomération et révélé de riches vestiges. La situation géographique remarquable, au croisement des voies reliant le littoral au versant méridional du Massif-Central, a permis à cette agglomération de connaître un important développement du VIe siècle avant notre ère jusqu’au Haut-Empire (Ier-IIe siècles de notre ère). Cet oppidum constitue ainsi l’un des principaux centres névralgiques à l’échelle du Languedoc central à l’âge du Fer. L’époque gallo-romaine voit les habitants s’installer progressivement sur les pentes orientales du Pech. De nouvelles découvertes majeures furent faites en 2013 en contre-bas de l’oppidum. Là, les fouilles dirigées par O. Ginouvez (Inrap) prélablement au projet de lotissement « Les Terrasses de Montfo » (GGL Aménagement) ont permis la découverte d’un très grand sanctuaire installé à partir de 200 avant notre ère, des bâtiments d’accueil destinés au pèlerins et diverses installations artisanales et de service.

Vue aérienne du temple antique fouillé par l'Inrap en 2013 à Magalas.

Vue aérienne du temple antique fouillé par l'Inrap en 2013 à Magalas.

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Airimages, Inrap

Un espace funéraire inédit des VIe-Ve siècles avant notre ère

Sur le site des Hauts de Montfo, les recherches archéologiques ont permis de révéler un grand espace rectangulaire (13 x 8 m), identifié comme un possible lieu funéraire rituel protohistorique. Cet espace est un « enclos fossoyé », c’est-à-dire qu’il est délimité par quatre fossés. Orientée vers l’est, cette grande structure est subdivisée en deux parties par deux petites fosses opposées. L’entrée dans l’enclos se faisait probablement par un passage situé entre deux fossés à l’est. Les restes d’un bûcher funéraire ont été mis au jour dans la partie orientale de l’enclos. Il a livré les restes de vases d’offrande au défunt, dont des restes de vases grecs, des éléments de bronze fondu, peut-être des éléments de bijoux ou de parure, et des éléments de tabletterie en os, attribués à la décoration du lit mortuaire. En façade ouest de l’enclos, la présence de dalles en grès et d’indices sur leur mise en place verticale laissent supposer l’existence d’une sorte de muret, dispositif installé dans le fossé occidental. Les informations dont disposent les archéologues sont pour le moment lacunaires, mais l’étude permettra peut-être d’en préciser la fonction.

A quelques mètres, dans le fossé sud, une tombe comprenant un dépôt de céramiques (gobelets d’importation daté du Ve siècle avant notre ère) et un crâne de chien a été mise au jour. Autour de cet espace funéraire ont été retrouvées plusieurs autres structures à fonction funéraire ou en relation avec celle-ci, parmi lesquelles quatre fosses contenant des dépôts de vases et une autre tombe à incinération. Plus au sud, une structure profonde de quatre mètres et dont le diamètre atteint plus de cinq mètres a été mise au jour. Si sa fonction reste indéterminée, elle a révélé un mobilier atypique, dont des céramiques attiques à vernis noirs et des amphores vinaires massaliètes et étrusques datant des VIe-Ve siècles avant notre ère.

Urne funéraire découverte à proximité de l'enclos fossoyé protohistorique.

Urne funéraire découverte à proximité de l'enclos fossoyé protohistorique.

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Inrap



Les différents vestiges de la période protohistorique témoignent d’une proximité fonctionnelle et chronologique avec l’oppidum majeur de la région.

Un établissement agricole périurbain de la période romaine

Outre le sanctuaire protohistorique, les recherches archéologiques ont révélé un établissement agricole daté du Ier siècle avant au IIe siècle de notre ère couvrant environ 1500 m². Il est composé de plusieurs corps de bâtiments largement voués aux infrastructures de production.

Plusieurs grands pressoirs en bois ont été reconnus au travers des profondes fosses creusées pour y fixer solidement les châssis. Les leviers de ces puissantes machines disparues étaient mus à l’aide d’un treuil ou d’une vis. Ils étaient destinés à la production de vin et, plus hypothétiquement, à celle d’huile d’olive.

Un archéologue de l'Inrap fouille un ensemble de fosses qui étaient destinées à accueillir les dolia, grandes jarres de stockage.

Un archéologue de l'Inrap fouille un ensemble de fosses qui étaient destinées à accueillir les dolia, grandes jarres de stockage.

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Pascal Druelle, Inrap


Les jus étaient réceptionnés en premier lieu dans des cuves maçonnées (béton de tuileau et mortier de chaux, revêtements de briquettes). Quatre exemplaires ont été découverts à proximité des pressoirs. Leur transfert s’opérait ensuite vers des jarres en terre cuite (dolia) pouvant contenir 1200 à 1800 litres. Ces grands récipients prenaient place dans les chais de l’établissement et le vin pouvait y vieillir avant d’être redistribué ou commercialisé.

Ces vestiges, associés à quelques fondations de murs, à des lambeaux de sols, une haie d’arbre ainsi qu’un puits, forment l’ossature de cette exploitation. En l’absence d’installations de confort (pièces d’apparat, thermes et bassins, jardin, etc.), ce complexe apparaît assez rustique,  essentiellement utilitaire. En cela, il se distingue des grandes villae domaniales, comme celle de la Condamine à Puissalicon. Il s’apparenterait ainsi à une ferme relativement modeste et laborieuse, fonctionnant dans un cadre familial et avec l’aide de quelques travailleurs saisonniers. Cet établissement pourrait se rapprocher de celui de Jurièires-Basses (Puissalicon) découvert en 1996 à proximité, dans l’emprise du projet d’aménagement du gazoduc « Artère du Midi », fouillé par l’Association pour les fouilles archéologiques nationales (Afan, association précédant l’Inrap).

Les recherches archéologiques menées aux Hauts de Montfo enrichissent un dossier magalassien déjà fourni et amènent un regard nouveau, tant sur l’agglomération protohistorique que sur l’occupation du territoire à l’époque romaine.

Aménagement : Groupe GGL
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Occitanie)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Emmanuel L’Hénaff, Inrap