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Rue des Flamboyants
L'emprise de la fouille couvre 295 m² dont 140 m² se sont révélés positifs. Le site se trouve à moins de 200 m de la baie de Grand Case en contrebas du morne First Stick Hill. Le décapage a permis de mettre en évidence un niveau archéologique identifié comme dépotoir. Ce dernier correspond aux marges orientales du site d'habitat de Grand Case Nord appartenant à la phase céramique et attribué au Néoindien récent.
La fouille a livré une quantité notoire de mobilier (1 372 kg) dont l'étude permettra de mieux appréhender les modes de vie et de subsistance pour cette période tardive encore assez mal documentée pour l'île de Saint-Martin (Guadeloupe).
Le site d'habitat de Grand Case Nord a été recensé par le service d'Archéologie de Guadeloupe dès 1997 à l'occasion de suivis de travaux. Trois interventions archéologiques ont été menées depuis sur ce gisement : un premier diagnostic, réalisé par Thomas Romon (Inrap) en 2012, sur une parcelle située à 55 m à l'ouest du terrain concerné ; un diagnostic, réalisé par Nathalie Serrand (Inrap) en 2013, sur la parcelle concernée ; et enfin un diagnostic, réalisé en 2014 par Jérôme Briand (Inrap), sur la parcelle voisine au nord. Les données recueillies lors de ces opérations font état d'une vaste occupation amérindienne identifiable comme un village du Néoindien récent et comparable au gisement de Pointe du Canonnier étudié par Dominique Bonnissent (Inrap, 2002, 2007, 2011, 2012). Selon les recherches déjà réalisées il pourrait s'agir d'un village organisé autours d'une aire centrale d'habitat sur poteaux ceinturée par des aires de rejets désignées comme dépotoirs.
Une intéressante zone de déchets
L'intervention porte sur l'extrémité orientale du village et plus particulièrement sur une zone de rejet. L'unique niveau archéologique est constitué d'un épandage de vestiges, que nous qualifions de rebuts, dont l'épaisseur varie entre 10 et 50 cm. Il s'agit d'une part de déchets de la culture matérielle, tels que de la céramique, des outils en pierre, en coquille mais aussi en corail ou en os ; et des résidus culinaires ou restes de consommation, tels que des coquilles marines, des restes de crustacés et des restes de faune vertébrée.
Parmi ces déchets nous trouvons également des indices matériels qui nous renseignent sur les usages esthétiques, folkloriques et artisanaux : comme des éléments de parure (perles en coquille), des sonnailles (instruments de musique en coquille), un peson pouvant avoir servit au tissage du coton ou une autre fonction.
Des activités de pêche et de chasse
La grande quantité des restes de faune marine montre que les communautés néoindiennes étaient très fortement tournées vers l'exploitation du milieu marin. La collecte de coquillages, de crustacés, de tortues et la pêche en mer sont les moyens de subsistance privilégiés qui laissent le plus grand nombre de restes. Toutefois, la chasse est aussi pratiquée et l'étude de la faune vertébrée devrait confirmer la présence de restes d'oiseaux, de reptiles et de rongeurs.
Des outils en pierre, en corail et en os
Les occupants du village amérindien de grand Case Nord disposaient à proximité de leur matière première favorite pour la confection d'outils en pierre : la cherto-tuffite dont un gisement naturel se trouve sur le morne. La calcirudite est également présente sur l'île et est aussi largement utilisée. La présence d'autres matières premières lithiques, en moindre quantité toutefois, renseigne sur les déplacements et/ou échanges des populations précolombiennes à cette époque dans les Petites Antilles. Une très grande quantité d'outils sur ces matériaux a été extraite de la fouille, le corail ainsi que l'os ont également servi à la confection d'outils.
La céramique
L'étude de l'assemblage céramique fait état d'une grande homogénéité typologique (D. Bonnissent) ce qui indique que la zone fouillée correspond à une même aire de rejet. L'attribution typo-chronologique renvoi au style Mill Riff de la sous-série mamoran-troumassoïde ; toutefois, quelques éléments provenant des niveaux supérieurs, sur cette parcelle et la parcelle voisine BK77 (Briand, 2014), pourraient appartenir à une période plus tardive. L'unique datation disponible actuellement a été réalisée lors du diagnostic et fourni également un âge plus tardif soit Cal AD 1010-1170 (Serrand 2013).
Perspectives
La fouille à venir de la parcelle BK77 nous permettra de mieux appréhender la dispersion spatiale de cette occupation amérindienne, de comprendre l'organisation et la structuration du village entre zone d'habitat à proprement parler, zone de dépotoir, et peut-être zone périphériques abritant diverses activités. Ce sera également l'occasion de vérifier la présence d'une occupation plus tardive venant chevaucher l'occupation mamoran-troumassoïde de style Mill Riff. Ces niveaux appartiendraient à des cultures méconnues voire inconnues à l'heure actuelle sur l'île de Saint-Martin.