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Un hôpital militaire américain de la Première Guerre mondiale mis au jour à Savenay (Loire-Atlantique)
Dans le cadre de la construction du lycée Saint-François d’Assise sur le site de la Gagnerie du Tertre à Savenay, l'Inrap a fouillé une unité de l’hôpital américain de la Première Guerre mondiale, en service de 1917 à 1919, une opportunité, sans précédent dans la région, d’explorer ce type d’installation et de révéler la réalité matérielle de la Grande Guerre, loin du champ de bataille.
Un déploiement logistique sans précédent
L’engagement des États-Unis dans la Première Guerre mondiale à partir d’avril 1917 annonce le déploiement sans précédent de sa force opérationnelle sur le territoire français. Placée sous le commandement du général Pershing, l’American Expeditionary Force (A.E.F.), composée de quelques 200 000 hommes en 1917, représentera à l’heure de l’armistice un contingent de près de 2 millions de combattants.
Les ports de Nantes et Saint-Nazaire, choisis pour la qualité de leurs infrastructures et leur liaison directe avec les principales lignes ferroviaires du pays, voient ainsi, dès le mois de juin 1917, l’arrivée des premiers « sammies ». Leur mission est alors de construire les infrastructures nécessaires à leur accueil.
Archéologues au travail lors de la fouille de Savenay.
© Antoine Le Boulaire, Inrap
Le service de santé de l’US Army
L’A.E.F. s’appuie au départ sur les hôpitaux français existants puis développe progressivement une chaîne de soins depuis le champ de bataille jusqu’aux zones de débarquement. Reliées par des ambulances et des trains sanitaires, plusieurs centaines de structures hospitalières sont construites à travers le pays allant du simple hôpital de campagne à de vastes centres en mesure d’accueillir jusqu’à 25 000 blessés et malades. Ces hôpitaux, regroupés au sein d’Hospital Centers, constituent de véritables villes autonomes avec leur route, leur service d’eau et d’électricité, leur réseau d’assainissement, voire, pour certains, leur propre desserte ferroviaire.
Vue aérienne de la fouille de la Gagnerie du Tertre.
© Ukkocartographie
Carte de l’implantation américaine de Savenay entre 1917 et 1919. En rouge : l’emprise de la fouille ; en noir : l’hôpital américain ; en jaune : les terrains réquisitionnés par l’armée américaine.
© Antoine Le Boulaire, Inrap
Archéologue au travail lors de la fouille de Savenay.
© Antoine Le Boulaire, Inrap
Un site témoin de l’implantation de l’armée américaine
Les vestiges du camp américain de la Gagnerie du Tertre, étudiés sur plus de 3 hectares, illustrent ces aménagements. Le site s’organise en deux secteurs distincts. Un premier secteur clos de palissades, repéré sur 1,6 ha, et un second secteur dans l’angle nord-ouest de l’emprise où une vingtaine de fosses dépotoirs ont été creusées.
L’unité mise au jour respecte un plan orthogonal de 150 mètres de large délimité par des palissades périphériques et fossés drainants assurant l’assainissement du site. L’espace interne, lui-même divisé par des clôtures, est occupé par une vingtaine de baraquements (logements, hangars, réfectoire, locaux techniques…) construits sur solins de mâchefer de 100 à 200 m² et par un réseau de canalisations d’eau potable.
Chaussures de soldats américains.
© Emmanuelle Collado, Inrap
Les fosses dépotoirs localisées dans l’enceinte du camp sont essentiellement implantées dans la moitié occidentale. Elles témoignent d’une certaine homogénéité tant dans leur creusement que leur comblement majoritairement composé de déchets de construction. Les fosses localisées à l’extérieur du camp ont quant à elles livré la majorité du mobilier archéologique. Il s’agit d’objets en lien avec la construction, ou relevant de la vie quotidienne. Les contextes militaire et hospitalier de l’occupation sont également rappelés avec la présence d’effets militaires ou produits de santé mais également de nombreux objets témoignant de la présence de prisonniers de guerre allemands et austro-hongrois.
Peignes.
© Emmanuelle Collado, Inrap
Boutons d’uniformes de l’armée américaine.
© Emmanuelle Collado, Inrap
Quarts de l’armée américaine.
© Emmanuelle Collado, Inrap
Pipe découverte lors du diagnostic.
© Emmanuelle Collado, Inrap
Boite de conserve en fer émaillé.
© Emmanuelle Collado, Inrap
Fioles médicales.
© Emmanuelle Collado, Inrap
Rasoir.
© Antoine Le Boulaire, Inrap
Plaque d’identité militaire du soldat allemand Ernst Lenz du 120e régiment d’Infanterie territoriale constitué dans le Wurtemberg.
© Antoine Le Boulaire, Inrap
Pince de médecine.
© Emmanuelle Collado, Inrap
Étui de montre à bracelet.
© Emmanuelle Collado, Inrap
Encrier.
© Emmanuelle Collado, Inrap
Miroir gravé.
© Emmanuelle Collado, Inrap
Un enrichissement des connaissances
Les perspectives de recherche offertes par la fouille archéologique sont nombreuses et s’inscrivent en complément de la recherche historique et des travaux de valorisation menés par le secteur associatif. Un dernier enjeu soulevé par cette opération est celui de la place à accorder à « ce temps américain » dans la construction de nos mémoires collectives que le projet en éducation artistique et culturelle mené avec l’atelier « Histoire et Mémoire » du lycée Saint-François d’Assise a pu aborder.
Au cours de l’année scolaire 2023-2024, 23 élèves de première du lycée Saint-François d’Assise ont participé, sur la base du volontariat, à un atelier intitulé « Histoire et mémoires de la Première Guerre mondiale » proposé par deux de leurs professeurs. Les lycéens ont assisté à plusieurs séances autour de cette thématique, dont une partie leur a permis de découvrir l’archéologie préventive, en partenariat avec l’Inrap. Cet atelier a conduit les élèves à réaliser une exposition sur les résultats de la fouille de l’hôpital américain de la Première Guerre mondiale.
L’exposition sera dévoilée le 23 mai au cours d’une soirée de restitution de ce projet en éducation artistique et culturelle. Une conférence d’Antoine Le Boulaire, l’archéologue responsable de l’opération de Savenay sera également proposée.
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Pays de la Loire)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Antoine Le Boulaire, Inrap