Préalablement à la pose d'un gazoduc par GRT Gaz (opération Arc de Dierrey), traversant notamment le département de l'Oise, plusieurs équipes d'archéologues sont intervenues le long du futur tracé. C'est ainsi qu'un nouveau sanctuaire gallo-romain a été mis au jour sur la commune d'Estrées-Saint-Denis, localisé à environ 1,8 km du bourg actuel, au sommet d'une ancienne butte tertiaire dominant à 87 m d'altitude. Sur près d'un hectare, le site a révélé les vestiges d'un fanum associé à un théâtre, ainsi que ceux d'une vaste cour bordée d'une galerie de circulation, partie probable d'un enclos sacré. 

Dernière modification
10 mai 2016

Un temple gaulois et un fanum du Ier s. de notre ère

Dans la moitié nord du site ont été découverts les vestiges d'un temple romain du Ier s. de notre ère, dont seules les fondations sont préservées. Constituées d'un radier de silex, celles-ci restituent en plan le dessin d'un fanum classique. La cella sub-carrée, qui abritait à l'origine la représentation de la divinité, est entourée d'une galerie où déambulaient probablement les fidèles. L'accès de la chapelle centrale est exclusivement réservé aux prêtres.
Par ailleurs, ce temple se situe au sein d'un espace sacré, le temenos, clôturé ici par un mur, le péribole. La fouille a démontré qu'un temple gaulois en bois (et en terre ?) précédait cet aménagement. Des vestiges de poteaux et d'éventuelles sablières ont été mis en évidence à l'emplacement même du fanum et du péribole. Les nombreuses monnaies retrouvées dans cet espace, ainsi que la céramique, indiquent que le lieu a été occupé dès le Ier s. avant notre ère. Outre un probable dépôt de fondation découvert à l'angle sud-ouest du temple gaulois, une fosse localisée entre celui-ci et le péribole originel a révélé notamment plusieurs fragments d'orle de bouclier, soulignant ainsi que des armes étaient entreposées, voire exposées, dans le temenos avant leur enfouissement ritualisé.

Le théâtre

Au sud de l'enceinte sacrée s'ouvre une vaste esplanade orientée nord-ouest/sud-est. Elle permettait probablement d'accéder à un théâtre. Le mur de scène et les murs de soutien latéraux de la cavea (partie où se trouvent les gradins) bornent le long côté sud du théâtre.
De l'espace scénique subsistent les fondations des murs soutenant le plateau de scène, qui fait face à l'orchestra (demi-cercle au centre des gradins), la partie monumentale la mieux préservée et la plus remarquable. Cet hémicycle de 16 m de diamètre est souligné par de grandes dalles de grès et de calcaire constituant alors deux marches. Celles-ci permettaient vraisemblablement de recevoir les sièges attribués aux personnages importants de la localité souhaitant ainsi assister aux discours et autres spectacles qui se jouaient dans ce lieu. Derrière eux s'installaient les autres spectateurs, certainement assis sur des gradins en bois. Cet espace composant la cavea s'élevait sur une butte de remblais dont la hauteur sera difficile à restituer. La superficie de ce théâtre est estimée à environ 1 814 m2. Construit dans le courant du Ier s. avant notre ère, il ne semble pas avoir perduré au-delà du IIe s. Cette datation demande toutefois à être affinée par les études en cours.

Les vestiges d'un enclos sacré ?

Dans la partie sud du site sont apparus les vestiges d'un enclos construit, orienté nord-sud. Il semble délimiter un grand espace ouvert, bordé par une galerie de circulation dont seules les fondations subsistent. Constituées d'un radier de silex, elles délimitent principalement l'angle sud-est de l'enclos ainsi que la fondation d'une probable tour-porche d'entrée, la suite étant située hors zone de prescription archéologique. Par restitution, la longueur générale de la galerie est estimée à 48 m. Sa largeur interne est d'environ 1,50 m pour des fondations larges de 0,70 à 0,80 m. Les fondations de la tour-porche, faites essentiellement de radiers de silex et de tuiles plates fragmentaires, définissent un espace quadrangulaire. A la faveur d'un nouveau décapage, il a été établi que cet enclos (maçonné ?) reprend le tracé d'un enclos fossoyé gaulois, attesté, entre autres, par des monnaies et des tessons de céramique, comme dans le cas du fanum. Plusieurs éléments du mobilier archéologique (rouelle, amulette, etc.) suggèrent que cet enclos délimite un espace sacré. En outre, son plan permet de le rapprocher de celui de la grande esplanade qui précède l'enclos sacré du sanctuaire de Ribemont-sur-Ancre et qui s'ouvre avec un porche monumental tenant lieu de propylée (vestibule conduisant à un sanctuaire).
Aménagement : GRT Gaz
Contrôle scientifique : Service régional de l'Archéologie, Drac Picardie
Recherches archéologiques : Inrap
Responsable scientifique : Samuel Guérin, Inrap
Contact(s) :

Elisabeth Justome
chargée de développement culturel et de communication
Inrap, direction interrégionale Nord-Picardie
06 73 73 30 33
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