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Amphithéâtre de Cimiez
A Nice, Alpes Maritimes, une intervention archéologique dans le cadre du projet de restauration et de mise en valeur mené par l'architecte en chef des Monuments Historiques, J.-A. Gatier, sur l'amphithéâtre de Cimiez (Cemenelum),
l'intervention archéologique vise à préciser les données chronologiques et fonctionnelles concernant l'édifice ainsi que l'impact des futurs travaux sur les niveaux archéologiques. Elle comporte deux volets : une étude des élévations et une fouille par sondages, représentant une superficie totale de 190 m2.
Depuis les recherches de N. Lamboglia puis de P.-M. Duval, menées en 1943 et publiées en 1946 dans Gallia, l'amphithéâtre de Cemenelum, chef-lieu de la province romaine des Alpes Maritimae, n'avait plus fait l'objet d'investigations archéologiques. Au rang des acquis de cette première fouille, on compte le fait que l'amphithéâtre, de taille modeste (57 x 69 m), comporte au moins deux états successifs matérialisés par deux anneaux concentriques de construction différente. Le premier anneau en opus vittatum est doté de gradins sur remblais, le deuxième anneau en opus mixtum est muni de voûtes qui soutiennent la seconde section de gradins. La mise en place du second anneau empiète au sud sur l'emprise d'un aqueduc alimentant la ville. L'hypothèse de l'existence de structures en bois avait été avancée afin d'expliquer les différences observées entre les liants des murs et des gradins du premier anneau ainsi que l'absence de vestiges d'escaliers desservant la deuxième section de gradins. Les datations proposées alors reposaient sur des considérations historiques, techniques et stylistique et des comparaisons avec des édifices de la péninsule italienne, et tendaient à attribuer la construction du premier anneau au Ier siècle de notre ère, voire à la période augustéenne.
La mise en place d'un PCR conduit par M. Jannet, conservateur du musée, et son équipe, sur l'ensemble du site de Cimiez vise à relancer les recherches sur Cemenelum et à actualiser les connaissances sur la cité. L'étude en cours de l'amphithéâtre s'inscrit également dans cette dynamique.
L'opération s'est attachée à rechercher des éléments de datation pour les différents états de construction et à caractériser les modes de construction. Une attention particulière a été portée à la recherche d'indices d'ancrages de structures en bois.
L'étude en cours ne permet pas d'énoncer dès à présent de conclusions définitives, cependant aucun élément de datation ne remonte avant la fin du Ier siècle, voire au début du IIe siècle de notre ère. À cette période, l'emprise de la future piste est occupée par des fosses creusées dans le substrat et comblées par des rejets d'activités artisanales liées au travail du bronze. Le premier édifice ne peut donc prendre place avant cet épisode artisanal et sa construction doit être placée dans le cours du IIe siècle. Le deuxième anneau n'est pas datable par la céramique à l'issue de cette opération, mais des datations archéomagnétiques des arases de briques sont envisagées. Des éléments provenant de la démolition des structures sont associés à une monnaie émise sous Probus (276-282) et donnent ainsi un terme minimal pour l'abandon de l'édifice. Les trous de boulins du premier anneau semblent devoir être rattachés uniquement au chantier de construction et non à la mise en place de structures en bois car leur espacement vertical de 60 cm est trop important pour l'étagement des gradins et, de plus, leur espacement horizontal est irrégulier. La différence de liant entre les gradins maçonnés du premier anneau et les murs de celui-ci sont vraisemblablement imputables à des raisons techniques car la même différence est observable entre les gradins du deuxième anneau et les structures porteuses formant ce dernier.
Les premiers éléments rassemblés tendent à réviser la chronologie de l'édifice et, à l'instar des amphithéâtres de Fréjus (consulter la notice de site archéologique de Fréjus) ou d'Arles, celui de Cimiez, malgré sa petite taille et son mode de construction sur remblais, s'inscrirait dans une vague de construction d'édifices de spectacle dans les provinces, postérieure à l'inauguration de l'amphithéâtre flavien de Rome. La relative exiguïté du plateau de Cimiez et la modestie de la ville ont sans doute orienté les choix constructifs vers des solutions techniques qui peuvent être archaïques mais peu coûteuses.