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Clinique des Dames Blanches
La fouille réalisée durant l'été 2010 sur le site de la clinique des Dames Blanches, au 33-39 rue Courteline, à Tours, intervient préalablement à la construction d'immeubles de logements par la société Bouygues Immobilier.
Le site est localisé à 500 m à l'ouest du centre historique de Tours (quartier Saint-Martin), à 300 m de la Loire. L'emprise de la zone étudiée couvre une superficie de 4 057 m² et concerne la moitié orientale d'un îlot urbain encadré par la rue Courteline, la rue de la Madeleine, la rue du Croc et le boulevard Preuilly.
Les berges de la Loire durant l'Antiquité et le Moyen Âge à Tours
La fouille a livré une concentration importante de vestiges archéologiques et a révélé différents états d'aménagements de la berge de la Loire durant l'Antiquité et le Moyen Âge, permettant de restituer selon quels rythmes et sous quelles formes l'espace urbain avait été conquis sur le fleuve : embarcadère du Haut-Empire et voie, nécropole du Bas-Empire, habitat et cimetière médiévaux. Les études interdisciplinaires ont associé archéologues, géologues et historiens.
La voie et l'embarcadère antique
Durant le Haut-Empire, la Loire se trouve à quelques dizaines de mètres au nord du site. Une voie de berge mène au centre ville de Caesarodunum (Tours), situé quelques centaines de mètres plus à l'est. L'actuelle rue Courteline est superposée à cet axe qui correspond au prolongement du decumanus maximus (axe majeur est-ouest). La fouille a mis en évidence quatre états d'aménagements de la berge.
Le dernier, daté du IIe siècle de notre ère, est caractérisé par un assemblage complexe de caissons en bois d'environ 8 m de côté, disposés en damier. Une rampe d'accès à la Loire fait alors office d'embarcadère. Cette construction est destinée à consolider la berge et à en limiter l'érosion, particulièrement active dans ce contexte de plaine d'inondation.
À la fin du IIIe s. ou au début du IVe s., une incursion de la Loire vers le sud entraine l'abandon de l'embarcadère, alors complètement ensablé. La transformation de l'espace en cimetière intervient à cette époque.
La nécropole du Bas-Empire
L'ensemble funéraire antique situé le long de la voie comporte 23 individus : hommes, femmes et enfants de tous âges, sans répartition spatiale particulière. La plupart des sépultures est datée du Bas-Empire (IVe siècle de notre ère), d'après le mobilier funéraire et les datations par radiocarbone.
L'étude anthropologique indique des inhumations majoritairement en contenant : des cercueils cloués, des cercueils chevillés ou des coffrages. Trois sépultures à caractère ostentatoire (dépôts funéraires, dimensions des fosses...) sont situées en bordure de la voie.
L'occupation médiévale
L'installation médiévale prend place au moment où s'amorce le recul de la Loire vers le nord. Cet espace libéré, situé en périphérie du bourg qui se crée autour de l'ensemble basilical de Saint-Martin, est alors rapidement aménagé par les hommes. Tandis que l'axe antique perdure, une nouvelle voie de berge est aménagé au nord du site et contient les occupations jusqu'au XIIe s. au moins. Ces habitats domestiques, implantés entre le IXe et le XIIe s. sont matérialisés par des trous de poteau, des celliers, des silos, et des fosses diverses ; cinq sépultures sont également dénombrées. Sans connaître précisément l'emplacement des bâtiments, il est vraisemblable qu'ils soient implantés en bordure de voie.
Un environnement mieux protégé
À la lumière des informations archéologiques recueillies sur le site de la clinique des Dames Blanches, il apparaît qu'un gain d'espace sur la Loire n'est jamais définitivement acquis avant le bas Moyen Âge. Il faut attendre l'aménagement des premières formes de « turcies » (digue en bois et en terre), peut-être dès le XVe s., mais surtout la construction de l'enceinte au XVIe s., pour pouvoir bénéficier d'un environnement stabilisé, mieux protégé des incursions intempestives du fleuve.