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Des occupations néolithique et gallo-romaine à Meaux (Seine-et-Marne)
À Meaux, dans le quartier de la Plaine Saint-Faron, une équipe de l'Inrap a mis au jour un radier et un mégalithe datant de la fin du Néolithique, voire du début de l’âge du Bronze, ainsi que des éléments de maçonnerie témoignant d'un habitat urbain gallo-romain, avant l'abandon du quartier au Bas-Empire.
L’opération de fouilles menée au 117 rue de Châage à Meaux (77) fait suite à un diagnostic de l'Inrap réalisé en 2009. Inrap) au sein du quartier de la Plaine Saint-Faron, à proximité d’un théâtre antique (reconnu dans les années 1990 rue Camille Guérin). Elle touche un verger abandonné, à l’arrière d’un pavillon existant. Le diagnostic avait révélé deux séquences d’occupation. Un niveau de pierres contenant du mobilier (dont une grande lame en silex), suggérait la présence d’un aménagement datant du Néolithique, tandis que des maçonneries et des fosses au comblement abondant de mobilier témoignaient d'une occupation pendant la période gallo-romaine. Sur une surface totale de 600 m², la fouille a livré des résultats conformes à l’estimation du diagnostic : sous les terres à jardin épaisses d’un mètre, sont apparus remblais, fosses et fondations de mur gallo-romains. Sous l’occupation gallo-romaine, un niveau sableux brun à roux couvre toute la surface de la parcelle, contenant du mobilier laténien, celui-ci recouvrant le radier, déjà observé au diagnostic.
Vue générale de l’emprise vers l’est, en fin de chantier.
© R. Jallot, Inrap
Un radier de la fin du Néolithique ou du début de l'âge du Bronze
Le radier est constitué de blocs aux dimensions variables, composé de grès, de meulières et de calcaire. La nature des blocs et la présence de mobilier au sein du radier indiquent aussi un aménagement anthropique, dont la fonction et la datation ne sont pas encore bien déterminées. Perturbé par les nombreux creusements postérieurs, le radier a pu être dégagé à deux endroits sur l’emprise : sur une surface de 20 m² sur la partie nord-ouest et environ 100 m² sur la partie centrale de l’emprise. Une fois dégagé, celui-ci a fait l’objet d’une levée en photogrammétrie pour une restitution en 3D et afin de localiser des éléments de mobilier (silex, grès, ossements, tessons de céramique non tournée). Cet aménagement pourrait dater de la fin du Néolithique, voire du début de l’âge du Bronze.
Vue du radier, perturbé par des fosses postérieures.
© Équipe de fouilles, Inrap
Dans ce contexte, un bloc de grès a été repéré sous les murs antiques et prélevé dans la partie ouest de l’emprise : pris dans une gangue de graviers carbonatés, le bloc, posé à l’horizontal et pesant près de 500 kg, est de forme triangulaire, de dimension 0,9 sur 0,7 m., et d’une épaisseur entre 0,4 et 0,6 m.; il semble que le bloc ait eu une position verticale au vu des stigmates d’érosion ; entreposé au centre archéologique de Croissy-Beaubourg, il est examiné pour confirmer des traces de taille ou la présence éventuelle de gravures. Ce mégalithe pourrait être contemporain de l’aménagement du radier, ce qui reste à confirmer.
Vue zénithale du mégalithe.
© R. Jallot, Inrap
Une occupation gallo-romaine
Concernant la période gallo-romaine, l’occupation s’intègre dans l’habitat urbain, déjà observé dans le quartier : suivant l’axe d’un cardo (axe nord-sud) reconnu auparavant, calqué sur la rue de Châage, l’habitat reconnu au 117 se manifeste par la présence de maçonneries aux extrémités ouest et est de l’emprise.
Vue zénithale des maçonneries gallo-romaines, secteur est.
© A. Berthier, Inrap
Au centre, l’espace est occupé par des creusements de fosses ou de puits (extraction ? puisard ?), certains profonds (jusqu’à la nappe phréatique à 3 mètres de profondeur). D’autres aux parois verticales évoquent la présence d’une ancienne cave (aux murs récupérés) ou d'un cellier aux parois boisées. Le comblement de ces fosses a livré un abondant mobilier du Ier au IIIe s., reflet de 300 ans de vie quotidienne dans ce quartier : vases céramique quelquefois peu fragmentés, faune, gravats de démolition comprenant de nombreux fragments de tuiles, des clous, et des enduits peints. Ces rejets domestiques ont été effectués aussi à l’arrière des habitations, pour combler des excavations ; cet espace correspondant au milieu de l’emprise indique sans doute la présence de jardin ou de cour.
Vue du comblement d’une fosse d’extraction.
© A. Berthier, Inrap
Enduits peints provenant d’une fosse.
© Alain Berthier, Inrap
Lot de céramique gallo-romaine du IIe s. provenant d’une fosse dépotoir.
© Alain Berthier, Inrap
Tabletterie, objets en os gallo-romains.
© Alain Berthier, Inrap
Dé en os.
© Alain Berthier, Inrap
Fragment de statuette ou pendeloque en os.
© Alain Berthier, Inrap
Les niveaux d’occupations liées aux maçonneries ne sont pas bien conservés, uniquement ponctuellement, souvent par tassement au-dessus de fosses sous-jacentes, et les fondations empierrées sont conservées seulement sur quelques assises. La présence d’enduits peints dans les fondations des murs suggère une nouvelle politique urbaine de construction (au IIe s. ?), dans un quartier sans doute non loti ou en restructuration.
Après abandon du quartier au Bas-Empire, la récupération sur le site est effective, de façon concomitante probablement à l’installation de l’abbaye de Saint-Faron : il semble que cette partie du quartier ait subi un nivellement pour la mise en culture et/ou en pâture. De cette période post-antique, semble dater la présence de quelques fosses-pierriers, de dimensions variables, de 0,5 à 0,8 m. de profondeur, dont la plus grande mesure 4 m. de long sur 2 m. de large. Remplies de blocs, de TCA, et du mobilier gallo-romain environnant en position résiduelle, la présence de ces fosses indique sans doute le souci de stocker et / ou d’enfouir des blocs non employés.
Vue zénithale d’un pierrier.
© R. El Hajaoui, Inrap
Exceptée la présence d’un puits qui est conservé au centre de l’emprise et d’un puisard bétonné, aucune construction contemporaine n’a perturbé la stratigraphie archéologique.
Plan masse des structures sur l’emprise.
© F. Barenghi, Inrap
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Île-de-France)
Responsable scientifique : Alain Berthier, Inrap