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Fouille d’une maison romaine aisée des IIe-IIIe siècles à Reims (Marne)
En amont de la construction de logements par Demathieu Bard Immobilier, rue de la Magdeleine à Reims, l’Inrap fouille un îlot d’habitation et une portion de voie romaine. Située à environ un kilomètre du forum, centre-ville de l’époque romaine, le caractère cossu des vestiges livre des informations intéressantes sur l’habitat romain et l’organisation de l'antique Durocortorum.
Une maison cossue éloignée du centre-ville antique
La ville romaine de Durocortorum est constituée d’îlots d’habitation quadrangulaires bordés par des rues qui forment un maillage d’axes perpendiculaires. Le cœur de la ville est le forum, encore en partie visible sur la place du même nom. Le forum, centre politique et religieux, marque le croisement des deux principales rues de la ville : le cardo maximus (axe nord/sud) et le decumanus maximus (axe est ouest). L’emprise de la fouille, aux 11-13 rue de la Magdeleine, est à environ un kilomètre à l’ouest du forum. Le chantier révèle une portion de la rue déjà identifiée à proximité par l’Inrap en 2018, ainsi qu’une partie d’un habitat de l’époque romaine qu’elle dessert. La rue est bordée de trottoirs en craie abrités par des portiques dont une base est encore visible. Les caniveaux et la chaussée se développent sous l’actuel bâtiment adjacent.
Entrée imposante de la maison romaine, de 3 mètres de long, qui se matérialise par les 2 bases carrées de piliers.
© Jean-Jacques Bigot, Inrap
Prise des points altimétriques avec le théodolite pour l'enregistrement des structures archéologiques.
© Jean-Jacques Bigot, Inrap
Équipe de fouille sur le terrain.
© Jean-Jacques Bigot, Inrap
Une maison des IIe-IIIe siècles avec enduits peints
Les archéologues ont dégagé des vestiges de murs qui délimitent des pièces d’une domus, une maison romaine des IIe-IIIe siècles. Au moins quatre pièces ont d’ores et déjà été identifiées. Deux grands blocs quadrangulaires, qui devaient sans doute supporter des piliers, marquent l’entrée depuis la rue. Il s’agit là d’une entrée imposante, loin de celles des simples boutiques ou maisons habituellement mises au jour en bordure de rue. Dans l’une des pièces arrières de cette maison, sous une couche de démolition, les archéologues retrouvent une quantité importante de fragments d’enduits peints. Ces peintures murales, ou fresques, sont appliquées sur le mortier des murs encore frais, il s’agit de la technique dite « a fresco ». A l’époque antique, les peintures murales ornent les maisons, des plus humbles aux plus somptueuses.
Fragments d'enduits peints, détail d'une main.
© Jean-Jacques Bigot, Inrap
Une mégalographie avec la figure mythologique d’Achille ?
Certains des fragments d’enduits peints prélevés révèlent que l’une des pièces de la domus présentait, sur l’un de ses murs, une mégalographie, soit une représentation en taille réelle. La découverte d’enduits peints avec certaines inscriptions indique qu’il pourrait s’agir de la figure mythologique d’Achille, héros légendaire de la Guerre de Troie. Ce type de peinture atteste que nous sommes dans l’habitation de gens lettrés et financièrement aisés.
Fragments d'enduits peints avec inscription de la figure mythologique d’Achille.
© Jean-Jacques Bigot, Inrap
Bien qu’éloignée du forum antique, cette riche domus permet d’appréhender de manière nouvelle ce quartier encore mal connu de la ville romaine de Reims qui est proche de la Vesle. En effet, grâce à cette rivière, alors navigable, de nombreux marchands faisaient commerce. Le dynamisme économique de ce cours d’eau peut probablement éclairer la présence d’une telle maison dans ce quartier et de futures découvertes pourraient permettre de mieux cerner le statut social de ses habitants à l’époque antique.
Vue d'ensemble de murs qui délimitent des pièces de la maison et des fosses antérieures à son édification.
© Jean-Jacques Bigot, Inrap
Succession de couches archéologiques à l'intérieur de la maison romaine.
© Jean-Jacques Bigot, Inrap
Vue générale d'une pièce de la maison.
© Jean-Jacques Bigot, Inrap
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Grand-Est)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Julie Léone, Inrap