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Fouilles d’une ancienne auberge de voyageurs à Linas (Essonne)
À Linas, à l’occasion d’un diagnostic réalisé en amont d’un projet d’aménagement de logements sociaux, à l’emplacement d’une casse automobile, l’Inrap a mis au jour les vestiges d’une ancienne auberge de voyageurs, construite au XVIIIe siècle. L’auberge bordait l’ancienne voie qui reliait Paris (40 km) à Orléans dont le tracé a été repris par la nationale 20.
Au bord de la route
De l’ancienne auberge, les archéologues ont pu dégager le sol en tomettes avec les traces de l’ancienne cheminée, une cave, le sol pavé (intact) de l’ancienne cour et les fondations d’une porte cochère. L’auberge était implantée dans un ensemble de bâtiments qui assuraient également les fonctions d’une ferme. Autour de la cour pavée, différents espaces ont été mis au jour tels que les écuries, les étables et un enclos à cochons. Á l’intérieur d’un bâtiment à l’ouest, l’équipe Inrap a retrouvé la fondation d’un pressoir à vin. L’auberge était entourée de vignes et ce pressoir semble indiquer qu’elle produisait elle-même le vin destiné aux voyageurs qui venaient y faire étape. Le pressoir est abandonné en 1825, et remplacé par une forge entre 1882 et 1910. L’espace a été occupé par un charron qui devait s’employer à la réparation des roues des charrettes, carrioles et véhicules divers qui circulaient sur cette voie, sans doute très fréquentée. Le site a livré une abondante quantité de mobilier en verre, des bouteilles et de très beaux verres à vin et à liqueur, ainsi que divers outils en fer dont certains servaient à réparer les roues.
Nouvelles approches
Ludovic Decock, l’archéologue (Inrap) qui a mené la fouille, remarque : « cette auberge est un objet assez nouveau de l’archéologie préventive, à l’instar de certaines fermes et sites agricoles-artisanaux que nous rencontrons au cours de nos opérations. Quand on fouille ces espaces récents, nos méthodes restent les mêmes mais l’approche est différente. Nous ne cherchons pas des structures au style architectural connu comme ceux du Moyen Âge par exemple, mais plus commun puisque très récent. Nous savons que nous pouvons atteindre rapidement le niveau de référence, situé sous une couche de remblai récent ou contemporain de celui du site recherché. Il faut être alors particulièrement vigilant, les structures recherchées pouvant être constituées du même type de dépôt que la couche supérieure, puisqu’il s’agit de contextes chronologiques proches. L’avantage de cette fouille est que nous disposions d’emblée du niveau de référence, qui était donné par le sol en tomettes et celui de la cour pavée, mis au jour au diagnostic. […] Un autre avantage de ces fouilles sur des sites récents provient de l’existence d’archives qui les documentent. Les sources écrites étudiées correspondent bien au site mis au jour et apportent un complément d’information non négligeable. Nous possédions notamment une carte postale de l’auberge, qui est une photographie des années 1900. Le bâtiment était mentionné sous l’appellation « cabaret », soit un lieu de consommation de boisson et de divertissement. La carte postale a conservé le nom du lieu : « Jubilé ». Cette première indication nous a amené d’abord à chercher dans des sources écrites une origine religieuse de ce lieu, mais les recherches en archives, ont permis de nous rendre compte que le nom associé à l’auberge était non pas « Jubilé », mais « Jus pilé », une expression qui prend évidemment sens si cette auberge pressait et produisait son propre vin. »
L'archéologie des Temps modernes
L’Inrap s’efforce depuis quelques années à étudier les sites de la période contemporaine, appelée communément les Temps Modernes. Chronologiquement, il s’agit de sites dont l’occupation couvre le XVIIIe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale. Des thématiques sont apparues : l’archéologie industrielle ou archéologie de la Révolution Industrielle qui s’intéresse aux usines, aux gares, à la technologie. L’archéologie artisanale, davantage liée à des sites ruraux et agricoles, s’évertuant à étudier l’organisation des fermes, d’un point de vue humain (l’habitat) mais également animal (les étables, écuries, etc.) et technique (pressoir, forge, outillage divers). Enfin, l’archéologie des conflits, avec notamment l’étude et la fouille des tranchées de la Grande Guerre ou des dispositifs du Mur de l'Atlantique. Il s’agit d’approcher des contextes nouveaux d’un point de vue archéologique apportant de nouvelles connaissances sur un passé récent peu exploité. C’est dans ce cadre qu’en Île-de-France le Service régional de l'Archéologie (SRA) a prescrit la fouille de la gare du Pecq, première gare de voyageurs de France, ouverte en 1837. Aussi surprenant que passionnant, cette fouille a apporté de précieux renseignements sur l’élaboration d’une gare : l’aspect majestueux des bâtiments, la technologie mise en place pour le fonctionnement des trains et le soin apporté à l’accueil des voyageurs. Depuis le bâti jusqu’au mobilier archéologique cette fouille menée en 2017 a permis d’approfondir des connaissances sur la naissance du train et du milieu ferroviaire en France.
Revoir la découverte de la première gare de voyageurs de France (Le Pecq)
Vue de la fouille de Linas.
Ludovic Decock, Inrap
Vue de la fouille de Linas.
Ludovic Decock, Inrap
Vue de la fouille de Linas.
Ludovic Decock, Inrap
Linas, la cour pavée.
Ludovic Decock, Inrap
Linas, le pressoir.
Ludovic Decock, Inrap
Linas, Chemin du Vieux Pavé de Bruyères.
Ludovic Decock