Vous êtes ici
La fouille d’une usine sidérurgique à Liverdun (Meurthe-et-Moselle)
Une équipe de l’Inrap a effectué une fouille archéologique à Liverdun, sur le site d’une ancienne usine. Les vestiges spectaculaires mis au jour ont été l’occasion de redécouvrir un pan de l’histoire industrielle de cette commune. C’est aussi la première fois en Lorraine, qu’une intervention archéologique est spécifiquement centrée sur une activité industrielle récente.
Un complexe industriel né sous le Second Empire
La surface étudiée (4000 m²) est relativement restreinte par rapport à l’emprise totale de l’usine, qui a été conçue comme un véritable complexe industriel. Cette usine possédait en effet une concession de mine de fer, une carrière de pierres calcaires, un établissement métallurgique produisant de la fonte, une briqueterie et diverses dépendances (écuries, remises, ateliers de réparation). Une cité ouvrière permettait le logement à demeure des mineurs et des ouvriers.
L’usine profitait également de deux infrastructures majeures, auxquelles elle fut autorisée à être reliée : le canal de la Marne au Rhin (aujourd’hui remblayé et effacé du paysage) et le chemin de fer. Ces voies de communication ont été mises en service quelques années seulement avant la construction des premiers bâtiments de l’usine, en 1865.
Sur la parcelle étudiée, les vestiges les plus anciens concernent uniquement l’activité d’extraction du minerai de fer et la cité-ouvrière quand, après la guerre de 1870, l’usine décide de mettre en service de nouveaux hauts-fourneaux.
Vue d’ensemble des vestiges archéologique mis au jour. Ortho-photographie réalisée à l’issue du décapage.
© Inrap, cellule topographique Lorraine.
Vue d’ensemble des vestiges archéologique mis au jour. Ortho-photographie réalisée en fin de chantier.
© Inrap, cellule topographique Lorraine
Plan de l’usine de Liverdun, conservé dans les archives de l’administration du canal de la Marne au Rhin.
© Inrap, Yannick Milerski et Archives départementales de Meurthe-et-Moselle (AD 54), 3 S 468
Vue d’ensemble de la fouille.
© Pascal Volpez / Inrap
Vue d’ensemble de la fouille.
© Estelle Bénistant, Inrap
Fondation du haut-fourneau.
© Pascal Volpez / Inrap
Une galerie liée au transport du minerai de fer
Une large galerie voûtée a été reconnue dès la phase de décapage. Interprétée comme galerie de roulage, elle permettait d’acheminer le minerai de fer, la minette, jusqu’à un quai de chargement situé à proximité du canal de la Marne au Rhin. La galerie mise au jour ne constituait toutefois qu’un élément d’un réseau de circulation souterrain plus vaste.
Cette galerie a fait l’objet d’une numérisation grâce à un scanner 3D. Une couverture photographique a aussi été réalisée par le Service de l’inventaire du patrimoine.
Galerie de roulage portant les traces de nombreux réaménagements effectués lors de la reconfiguration de l’usine sidérurgique.
© Inrap, Camille Demougin
Numérisation de la galerie par scanner 3D.
© Inrap, Jean-Baptiste Caverne
Extrémité de la galerie ouvrant sur d’autres galeries complètement obstruées.
© Inrap, Yannick Milerski
L’évacuation des eaux pluviales de la cité ouvrière
Les vestiges liés à la cité ouvrière, dont les bâtiments se situaient en dehors de l’emprise fouillée, correspondent à deux canalisations d’évacuation d’eaux pluviales. Le dispositif était complété par une citerne maçonnée, implantée à mi-pente, qui assurait également la régulation du débit de l’eau.
Citerne maçonnée, construite à l’emplacement du point d’inflexion du tracé de la canalisation d’évacuation.
© Inrap, Rémy Jude
Les vestiges de l’activité métallurgique
L’étude de ces vestiges figurait au cœur des problématiques scientifiques de ce chantier. Une imposante fondation d’un haut-fourneau a ainsi été mise au jour. La présence de quatre galeries en briques, au cœur même de la fondation, constitue une des particularités de cet ensemble.
D’autres installations, indissociables d’un haut-fourneau, ont aussi été appréhendées. Il s’agit notamment de la fondation d’un échangeur à air et de la base d’une cheminée en briques, dynamitée en 1925 par le Génie militaire.
Les piliers d’une halle de coulée, ainsi que les vestiges plus tardifs d’un atelier de martelage, ont aussi été étudiés.
Vestiges conservés du haut-fourneau, construit à proximité d’une galerie antérieure. En arrière-plan : vestiges de la fondation d’un échangeur à air et base d’une cheminée d’évacuation des gaz de combustion.
© Inrap, cellule topographique Lorraine.
Galeries en briques aménagées à l’intérieur de la fondation du haut-fourneau.
© Inrap, Camille Thaller
Galerie en briques reliant l’échangeur à air et la cheminée d’évacuation des gaz de combustion.
© Inrap, Lionel Viana-Corréa
Des blocs de pierre du pont-canal de Liverdun
Les derniers vestiges présentés ici correspondent à de nombreux blocs architecturaux, retrouvés dans des remblais récents. Leur étude, réalisée avec l’aide d’un tailleur de pierre, a permis de confirmer leur appartenance au pont-canal de Liverdun. Ce pont, qui permettait au canal de la Marne au Rhin de franchir la Moselle, a été démoli à l’explosif en 1978. Certains blocs témoignent d’une importante campagne de restauration, réalisée peut-être après les hivers 1890 et 1891.
Remblais situés à l’emplacement d’une galerie détruite, contenant de nombreux blocs architecturaux appartenant au pont-canal de Liverdun.
© Inrap, Yannick Milerski
Ce chantier de fouille, au-delà des questionnements soulevés par les services patrimoniaux de l’État, a aussi permis aux habitants de Liverdun, de (re)découvrir et de s’approprier une partie de l’histoire de leur territoire, une dimension sociale de l’archéologie peut aussi être évoquée.
Visite sur la fouille avec le responsable d'opération.
© Estelle Bénistant, Inrap
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac, SRA Grand Est)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Yannick Milerski, Inrap