Un projet de requalification et de renouvellement des réseaux d’eau de la place de l’abbaye de Baume les Dames a donné lieu à la prescription par l’Etat (DRAC Bourgogne - Franche-Comté) d’un diagnostic archéologique puis d’un suivi de travaux réalisés en juin 2022 et à l’automne 2023 par l’Inrap. Ces interventions ont fourni des données inédites sur la topographie et l’évolution de l’abbaye dont les bâtiments subsistants, édifiés en grande partie au XVIIIe siècle, les sous-sols et les vestiges archéologiques bénéficient d’une protection au titre des Monuments historiques.

Dernière modification
09 janvier 2024

Une abbaye bénédictine

La place de l’abbaye à Baume les Dames est établie cœur d’un ancien enclos abbatial. Elle est ceinturée par des bâtiments édifiés entre le XVe siècle et le XVIIIe siècle : l’église abbatiale construite entre 1758 et 1781 (et dont la nef est demeurée inachevée) au nord-est, le logis abbatial et ses dépendances au nord et à l’ouest, et les maisons de chanoinesses au sud. Les sources historiques les plus fiables permettent de placer la fondation de cet établissement au plus tôt au VIIIe siècle. Les données historiques disponibles sur l’établissement conventuel sont toutefois relativement pauvres jusqu’au XVe siècle. Les procès-verbaux de visite de contrôle du bâti de l’abbaye, rédigés à la suite du décès des abbesses, offrent en revanche de précieuses informations pour les siècles suivants.


Deux églises abbatiales antérieures à l’édifice actuel

Les plans partiels de deux églises successives, antérieures à l’église abbatiale édifiée au XVIIIe siècle ont été mis au jour dans l’axe de sa nef, à l’ouest. L’édifice le plus ancien était doté d’une nef unique, large dans l’œuvre de 9,30 m, et close par des murs épais d’au moins 1,20 m. Des sépultures ont été mises au jour aux abords extérieurs, dont l’une datée par radiocarbone entre 1032 et 1202. Cette probable église est assurément antérieure au XIIIe siècle, période où elle est détruite, pour permettre la construction d’une nouvelle église abbatiale composée cette fois d’une nef principale et de deux collatéraux, larges de respectivement 9,50 et 5 m, séparés par des piliers assis sur les fondations de l’édifice antérieur. Un clocher-porche précède la nef principale à l’ouest. Un procès-verbal de visite de l’église daté de 1725 indique que « l’on descend cinq marches d’escalier à ce portail [= porche], d’où l’on entre dans l’église ». De fait, le sol de l’église du XIIIe siècle, dont un lambeau pavé a été dégagé, se trouve 1,40 m sous le niveau du sol de l’église du XVIIIe siècle.

Une fosse de coulée de cloches a été aménagée dans le courant du XIIIe siècle dans la nef principale. Au sein de cette fosse, dont le comblement était riche en résidus d’alliage cuivreux, a été observée la base de deux noyaux de cloche en argile jaune, de 0,51 et 0,80 m de diamètre.

Aux abords de la nef, à l’ouest, une aire funéraire est établie. Sa période de fonctionnement reste à préciser mais ne semble pas s’étirer au-delà du XVIIe siècle, voire du XVIe siècle.

L’église du XIIIe siècle a subi des réfections dont la datation reste à préciser. Elle a été détruite en deux temps (sanctuaire puis nefs) dans le courant du XVIIIe siècle pour laisser place à l’édifice actuel, dont la nef et les collatéraux inachevés épousent le plan.


Le cloître

Un cloître avec fontaine est attesté au sud de l’église au plus tard au XVIe siècle. De fait, son emplacement est occupé par un dispositif de récupération des eaux pluviales composé d’un puits perdu, parfaitement centré, dans lequel débouchent quatre conduits maçonnés rayonnants.

Une fontaine a été adossée contre le mur méridional de l’église entre la seconde moitié du XVIIe siècle et le XVIIIe siècle. En subsiste le socle monolithique associé à un conduit d’évacuation, le massif de fondation du bassin de plan semi-ovalaire, et un sol pavé se déployant alentour. Les remblais liés à l’abandon de cette fontaine, datés au plus tôt de 1792, ont livré un mobilier varié et abondant, dont un fragment de dalle funéraire et des bésicles.

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Vue des vestiges de la fontaine accolée contre le mur sud de l’église.

© Adrien Vuillemin, Inrap

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Fragment de pierre tombale en calcaire marbrier avec une inscription rehaussée à la feuille d’or.

© Philippe Haut, Inrap


Des vestiges antérieurs au Xe siècle ?

S’ils n’ont été appréhendés que de manière très lacunaire et qu’ils restent en l’état difficiles d’interprétation, des vestiges antérieurs et/ou contemporains de la « première » église ont été reconnus, telles deux fosses à la fonction indéterminée recoupées par la tranchée de fondation de celle-ci. Dans l’emprise du cloître, un trou de poteau et une maçonnerie sont scellés par une couche de remblai datée largement entre le Xe et le XIIIe siècle, tandis que le mur de façade de la « seconde » église est assis sur un mur désaxé.

Les études spécialisées qui débutent et les analyses radiocarbones entreprises sur les sépultures et des charbons prélevés dans les liant des maçonneries, permettront de préciser le phasage d’un site au potentiel archéologique remarquable.

Aménagement : Mairie de Baume les Dames
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (DRAC Bourgogne - Franche-Comté)
Recherche archéologique :  Inrap
Responsable scientifique : Adrien Vuillemin