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Plateforme départementale d'activités de Dambach-la-Ville
A Dambach-la-Ville, Bas-Rhin, sur les 30 ha diagnostiqués en 2003, 14 ha se sont révélés archéologiquement positifs avec la mise au jour de plusieurs fours de potiers d'époque gallo-romaine.
La fouille archéologique a porté sur 3 ha divisés en 5 secteurs. Une prospection géomagnétique, conduite sur 10 ha entre les secteurs de fouille, a confirmé la densité et l'extension remarquables des vestiges archéologiques.
Les archéologues ont fouillé 39 fours de potiers et 3 fours de tuiliers auxquels s'ajoutent 2 fosses d'installation de tours de potier, 2 puits, 1 cave, des fossés, des fosses et une multitude de trous de poteau indiquant la présence de
bâtiments divers. Cet atelier de production de céramiques communes et de tuiles a fonctionné de la fin de la période gauloise (La Tène finale, vers 40 av. J-C.) jusqu'à la fin du IIe siècle apr. J.-C., longévité record pour ce type de site.
Par la superficie étudiée et le nombre de fours fouillés, la découverte archéologique de Dambach-la-Ville « Wilmstein » correspond au plus important centre de production céramique installé en milieu rural à avoir été fouillé non
seulement en Alsace, mais aussi en France. La superficie totale de l'officine qui peut être estimée grâce à la prospection géomagnétique à plus de 13 ha en fait un site d'exception.
Les fours de potiers
L'atelier de potiers gallo-romain est implanté à proximité d'une voie romaine, mais aucune agglomération ni aucune villa ne sont à ce jour connues dans les environs proches. La plupart des fours de potiers mis au jour ont fait l'objet d'une fouille manuelle, nécessitée par la qualité des vestiges et la volonté de procéder à des datations par archéomagnétisme. La diversité de leur architecture et leur agencement dans l'espace méritaient une étude fine. Nous avons pu parfois mettre en évidence une organisation en batterie regroupant entre 2 et 5 fours qui fonctionnent avec une aire de service commune. 4 fours de potiers à deux alandiers opposés de part et d'autre de la chambre de chauffe s'inscrivent, sur le plan typologique, dans la tradition des fours laténiens, datation confirmée par le mobilier céramique et par l'archéomagnétisme. Les autres fours de potiers fouillés, de type romain quant à eux, présentaient des plans variés (circulaire, ovale, quadrangulaire, quadrangulaire crénelée). Les soles étaient soutenues par divers dispositifs dont le plus fréquent est la languette axiale à laquelle peuvent être associés des supports latéraux rayonnants. Des systèmes de supports latéraux sans languette sont également attestés.
Six phases de production de céramique ont pu être établies grâce à l'étude des 61 000 tessons recueillis. La production est attestée de 40-30 av. J.-C. à 200 apr. J.-C. Pour les cinq premières phases, c'est le contenu de chaque four, constituant un ensemble homogène, qui permet de sérier les productions et de donner leur chronologie. En revanche, pour la dernière phase, seuls les ratés de cuisson, retrouvés dans une cave, témoignent d'une phase de production plus tardive, attestant ainsi l'existence d'un ou de plusieurs fours de potier, situés hors des secteurs décapés, ce que suggère également la prospection magnétique. Les techniques et le répertoire de ce centre rural de production céramique, parmi laquelle la céramique commune domine, évoluent de façon significative au cours de plus de deux siècles d'activité. L'important développement du centre de production de Dambach-la-Ville est certainement lié à la proximité d'axes commerciaux majeurs et à celle des matières premières (argile, sable, bois, eau...). Sa localisation témoigne également du dynamisme économique du centre de l'Alsace où les sites de consommation demeurent cependant mal connus. Enfin, il est remarquable qu'au sein de chaque secteur, on observe une orientation dominante des vestiges complètement indépendante de leur chronologie (orientation nord-ouest/sud-est en secteur 1, est-ouest et nord-sud en secteurs 2 et 3, nord-est/sud-ouest en secteur 4). Ces orientations ont du être dictées par les contraintes du parcellaire antique.
De nombreuses questions restent sans réponse. Seule une fouille exhaustive de l'officine aurait permis de donner une image globale du centre de production de Dambach-la-Ville.
La tuilerie
Au secteur de fouille 4 correspond l'emplacement d'une seule unité de production gallo-romaine : une tuilerie. Plusieurs types de structures ont été mis au jour : 1 four de tuilier, 2 puits, quelques fosses et de nombreux trous
de poteau. L'atelier est organisé autour du grand four quadrangulaire. Ce dernier a connu au moins 4 états au cours desquels il a été successivement exhaussé et agrandi. L'analyse typologique et spatiale des trous de poteau a permis de dresser le plan complet de trois halles servant à stocker et à faire sécher les tuiles crues. Le plan de ces halles et l'élévation qu'il est possible de restituer présentent de très fortes analogies avec ceux de halles de tuilerie d'époques
moderne et contemporaine. Selon les datations archéométriques (dendrochronologie en ce qui concerne le cuvelage d'un puits, archéomagnétisme quant au four de tuilier) et celles de quelques poteries découvertes dans le comblement, cette tuilerie a fonctionné entre 30 apr. J.-C. et le début du IIe siècle. La répartition des structures permet de scinder son activité en deux périodes dont la seconde correspond à l'agrandissement du four de tuilier et à la démolition d'une halle remplacée par une autre. La précision des datations, la connaissance du plan complet de la tuilerie et de son évolution sont tout à fait remarquables pour un site de cette nature. Mais l'aspect le plus exceptionnel tient dans la restitution complète de trois halles de séchage de plans différents. Ces caractéristiques font de la tuilerie de Dambach-la-Ville un site de référence dans l'étude de la production antique de matériaux de construction en terre cuite.