L’Inrap vient de mettre au jour à Trémuson (Côtes-d’Armor) un remarquable ensemble de sculptures gauloises : quatre bustes enfouis au milieu du Ier siècle avant notre ère, dont celui d’un homme barbu et moustachu portant un torque autour du cou.

Chronique de site
Dernière modification
22 novembre 2024

Lors d’une fouille réalisée sur prescription de l’État (ministère de la Culture, Drac Bretagne) à Trémuson (Côtes d’Armor), dans le cadre de l’extension de la plateforme Bourguignon, une équipe de l’Inrap vient de mettre au jour un ensemble de sculptures gauloises de tout premier plan : quatre bustes enfouis au milieu du Ier siècle avant notre ère, dont celui d’un homme barbu et moustachu portant un torque (collier) autour du cou. Trois d’entre eux ont été mis au jour dans un puits comblé à la période gauloise qui a également révélé un remarquable seau en bois cerclé de bronze ouvragé. Il est extrêmement rare de pouvoir étudier de tels vestiges sur les lieux-mêmes où ils ont été enfouis ou abandonnés.

Une résidence aristocratique

Les archéologues de l’Inrap fouillent, sur le lieu-dit « la Morandais » à Trémuson, dans l’ancienne cité des Osismes (Osismii), l’espace résidentiel d’une ferme gauloise fondée au IVe siècle avant notre ère. Au IIe siècle avant notre ère, de nombreux vestiges témoignent de la richesse des propriétaires. La céramique mise au jour est une production locale soignée et des fragments d’amphores assez nombreux indiquent que les habitants consommaient du vin d’Italie puis d’Espagne. Les trous de poteaux et les tranchées de fondation des parois dessinent des plans de maisons d’une centaine de m² chacune. Enfin, la zone résidentielle est au cœur d’un vaste enclos délimité par un fossé monumental, autrefois bordé d’un talus, auquel on accédait par un porche dont la toiture était supportée par des poteaux massifs. La péninsule bretonne est alors un territoire densément occupé et ces résidences sont celles de puissantes familles de l’aristocratie locale.

Un ancêtre illustre ?

La première statue, la plus spectaculaire, haute de 40 cm, a été mise au jour face contre terre dans une fosse rectangulaire. Sculptés dans la roche, les traits du visage, ciselés avec détails sont ceux d’un homme à la chevelure et la barbe soignées, rappelant ceux de la tête barbue figurant sur une série de monnaies datées du milieu du Ier siècle avant notre ère, attribuées à la cité des Riédones. La partie inférieure du buste, non travaillée, se termine en pointe, laissant penser qu’elle devait être fichée dans le sol ou dans un autre matériau. Lors de son nettoyage, des analyses chimiques seront effectuées afin de révéler des traces éventuelles de polychromie. Ce buste était accompagné d’un vase et de six objets métalliques en cours d'étude. Les autres statues ont été mises au jour lors de la fouille du puits où elles ont probablement été jetées.

Ces œuvres rappellent celles retrouvées à Paule (1988-1992), à 70 km de là, dont le fameux personnage à la lyre, interprétées comme les effigies de membres de l’aristocratie destinées à perpétuer leur mémoire et la grandeur de la famille. La trentaine de bustes semblables identifiés en Gaule présente souvent un torque autour du cou, symbole de la bravoure et de la dignité des défunts, ou un attribut de leur rôle au sein de l’aristocratie gauloise, comme une couronne, un poignard ou encore la lyre d’un barde à Paule.

Aménageur : SCI Trému
Contrôle scientifique : Service régional de l’Archéologie (Drac Bretagne)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Stéphane Bourne, Inrap