Dans le quartier de Montmuzard à Dijon, une équipe de l'Inrap a mis au jour des vestiges gallo-romains et modernes éclairant l’histoire du château de Montmuzard.

Dernière modification
22 mars 2022

Une occupation antique précoce (40/30 av. J.-C. à 10 ap. J.-C.)

L’occupation la plus ancienne remonte à l’Antiquité voire à l’époque gauloise. Il s’agit de l’angle fossoyé d’une probable villa à l’intérieur duquel les restes d’une cave ou d’un cellier ont été mis au jour. Un autre fossé, orienté nord-sud, traverse la parcelle plus à l’ouest et semble constitué une limite parcellaire importante. Un paléosol, des fosses, des trous de poteaux, d’autres fossés et des empierrements, datés de la même période, viennent compléter les découvertes. Cette occupation antique précoce à tout juste 1 km du centre actuel de Dijon reste encore assez mal documentée.

Cet établissement, si l’on ne connaît pas ses caractéristiques (dimensions, forme de l’enclos), semble correspondre à un établissement rural implanté à tout juste 400 m à l’est de la voie d’Agrippa et à proximité immédiate d’un axe de circulation antique menant à Mirebeau-sur-Bèze où une présence militaire semble attestée à la même période. Cet axe de circulation pourrait expliquer cette installation précoce comme en témoigne également le mobilier céramique. Les tessons découverts montrent en effet des importations (plat en vernis rouge Pompéien, amphores massaliète et bétique) dont la circulation est rarement attestée dans le secteur dijonnais à l’exception de sites à la dynamique particulière comme Mirebeau-sur-Bèze ou Labergement-Foigney ou d’agglomérations de premier plan comme Autun et Châlon-sur-Saône. Au-delà de ces importations, la période mise en relief au travers de mobilier résiduel correspond à l’horizon ancien du règne d’Auguste rarement observé dans le secteur.

 

Les jardins du Château de Montmuzard

L’intervention archéologique, même si elle ne se situe que sur une infime partie de l’ancien domaine de Montmuzard, a permis d’observer certains éléments ayant trait au jardin de l’ancien château construit au début du XVIIIe siècle par la famille Fyot. L’étude des vestiges du jardin et notamment de remblais, de fosses de plantation et d’un caniveau traversant la parcelle d’est en ouest a été confié à Cécile Travers, spécialiste des jardins.

Un plan de Dijon de 1693 montre que le secteur de la fouille faisait partie de l’enclos de Montmuzard, vaste domaine foncier constitué autour d’une ancienne motte castrale, mais qui n’était pas encore aménagé en jardins. Un premier état de jardins est documenté par un plan de la ville datant de 1730. « Ce jardin faisait l’admiration des visiteurs, on y pénétrait du côté de la ville par une large avenue qui menait au vieux château. Des bosquets, des charmilles, des allées ombreuses alternaient avec des pièces d’eau » (E. Fyot). La fouille conforte cet état en révélant la présence d’un bosquet carré traversé par deux allées en croix.

Ce premier jardin est modifié dans les années 1750 par Claude-Philibert Fyot (1696- ...) marquis de la Marche, président à mortier (de chambre) au parlement de Bourgogne, mais aussi homme très cultivé, ami de Voltaire. Une carte de 1759 témoigne de ce second état tout comme les vestiges d’un parterre régulier formé de pièces de gazons entrecoupées de motifs circulaires.

Converti en terres cultivables à la Révolution, le parc sera peu à peu démantelé et loti aux XIXe et XXe siècles. Le parterre sur lequel se trouve l’emprise de la fouille disparaît lui à la fin du XVIIIe siècle. Il retrouve une certaine vocation d’agrément à la fin du XIXe siècle avec la plantation de grands arbres d’ornement et c’est dans le courant du XXe siècle que des terrains de sport dépendant de l’établissement scolaire voisin y sont aménagés.

Fouiller un jardin

Le sous-sol d’un jardin conserve l’empreinte des interventions paysagères qui ont jalonné son histoire. Travaux de plantation, aménagements hydrauliques, apport de bonne terre, travaux de terrassement, création d’allées, tous ces gestes techniques laissent des traces au sein des sédiments. Ainsi, les parcs et jardins se révèlent être des objets d’étude pour l’archéologie et sont de plus en plus pris en compte dans les prescriptions d’archéologie préventive émises par l’État.

L’archéologie des jardins s’appuie sur des disciplines environnementales telles que la pédologie (étude des sols), la géomorphologie (étude des formes du paysage), ou la palynologie (étude des pollens). Elle requiert aussi des connaissances élargies en histoire de l’art des jardins et en histoire des techniques. Sur le terrain, plusieurs méthodes d’investigation sont possibles et complémentaires : prospections géophysiques, sondages ponctuels, fouilles. Ces interventions font toujours suite à une analyse approfondie de la documentation historique. L’analyse archéologique consiste ensuite à confronter cette documentation aux données de terrain. Il est ainsi possible de remonter le temps et de reconstituer l’histoire structurelle du jardin depuis l’époque de sa création jusqu’à nos jours comme ici pour le jardin du château de Montmuzard.

Aménagement : Nexity
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Bourgogne-Franche-Comté)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Céline Capdeville, Inrap