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Vestiges du jardin de la Chartreuse de Champmol à Dijon (Côte-d'Or)
L’Inrap mène actuellement une fouille de 5000 m2 au sein du Centre Hospitalier de la Chartreuse, dans l’enceinte de l’ancien monastère des Chartreux à Dijon. Un pressoir et un réservoir dont les sédiments ont livré des vestiges abondants ont été mis au jour par les archéologues.
Fondé en 1383 par Philippe le Hardi, ce monastère - destiné à être le « Saint-Denis » des ducs de Bourgogne - était situé alors en dehors de la ville de Dijon sur un terrain humide, entre le cours de l’Ouche, la source du Raines et un étang aujourd’hui disparu, « l’étang l’Abbé ».
Plan du monastère des Chartreux au XIVe siècle.
© Bibliothèque Municipale de Dijon
Sous la révolution française le site est vendu, les bâtiments démantelés et les œuvres d’art éparpillés dans différents musées. Aujourd’hui, les ensembles conservés du monastère sont le « Puits de Moïse », le portail de la chapelle qui contenait autrefois les tombeaux des ducs Philippe le Hardi et Jean Sans Peur, la tourelle de l'oratoire du duc, le puits dit de Jacob et le portail d'entrée. La fouille située entre le monastère et la porte du Raines, accès direct vers le centre de Dijon, révèle aujourd’hui la partie sud du pressoir médiéval ainsi qu’une partie des jardins médiévaux et modernes.
Vue aérienne du site de la Chartreuse : en arrière-plan la rivière de l’Ouche. Au centre des bâtiments du XIXe siècle un petit édifice abrite le Puits de Moïse, au premier plan l’emprise de la fouille archéologique conduite par l’Inrap.
© Christophe Fouquin, Inrap
Vue aérienne de la fouille. Vestiges du pressoir des moines dans le coin bas gauche, vestiges de l’importante canalisation dans le coin haut droit.
© Christophe Fouquin, Inrap
Fouille : les vestiges du pressoir sont à gauche du cliché.
© Christophe Fouquin, Inrap
Au premier plan : le réservoir nord, séparé du pressoir par un mur.
© Christophe Fouquin, Inrap
Fouille de l’espace compris entre le pressoir et le réservoir.
© Christophe Fouquin, Inrap
Relevés et enregistrement.
© Christophe Fouquin, Inrap
Le pressoir médiéval
Une petite partie d’une construction massive a été mise au jour : les fondations de murs larges d’1,30 m et renforcés par de puissants contreforts dans les angles et sur les côtés annoncent un bâtiment imposant. Les différents plans conservés aux Archives indiquent que cet édifice (légèrement trapézoïdal) abritait le pressoir des moines qui cultivaient la vigne et produisaient du vin. La présence de milliers de pépins de raisins visibles à l’œil nu lors de la fouille confirme cette fonction. Sa construction a commencé dès 1394 : le bâtiment était fonctionnel au commencement du XVe siècle. Les niveaux de sol de ce bâtiment n’ont pas été conservés.
Prélèvement des pépins de raisin au tamis.
© A. Couilloud, Inrap
Les réservoirs : vivier pour les moines et sources de découvertes pour les archéologues
A quelques mètres du pressoir, un fossé large d’environ 13 mètres a été mis au jour. Il était autrefois en eau et délimité sur deux côtés par des murs : l’un au nord du côté du bâtiment, l’autre à l’ouest en limite de chemin. Ce fossé / réservoir servait de vivier, élément indispensable pour alimenter le monastère en poissons. Le fond du fossé est particulièrement envasé : les sédiments ont livré un mobilier abondant : cuir (fragments de bottes), bois (fragments de tonneaux, planches, piquets, bois travaillé), céramique, tuiles, verre, faune et nombreux objets métalliques très bien conservés. Parmi ceux-ci, l’équipe de fouille a mis au jour un plat en étain de type patène, quelques monnaies, bagues, objets décoratifs et vestimentaires, outils, anse de marmite, clés, couteau avec manche en os, etc. La grande majorité de ces objets semble être datée du XVIIe siècle. Cette datation (à confirmer par les futures études de laboratoire) indique d’une part que le fossé a été curé régulièrement aux XVe et XVIe siècles avant qu’on ne le laisse s’envaser et d’autre part qu’il a été comblé au cours du XVIIe ou au début du XVIIIe siècle, avant la Révolution Française et la démolition de la Chartreuse.
Bois travaillé et ossements d’animaux mis au jour dans le réservoir.
© S.Morel, Inrap
Clé provenant du réservoir.
© S. Morel-Lecornué, Inrap
Fouille d’un squelette de porc mis au jour dans le jardin.
© Christophe Fouquin, Inrap
Une canalisation massive en pierres
Une canalisation très importante, composée de grands blocs recouverts de dalles mesurant plus de 60 cm de long a été mise au jour dans le réservoir est. Cette canalisation - destinée probablement à évacuer l’eau de l’étang en direction de l’Ouche – a été érigée au moment du comblement de cette partie du réservoir. Bien colmatée par un mortier hydraulique (dit « de tuileau ») cette canalisation est restée étanche jusqu’à aujourd’hui.
Canalisation installée à l’intérieur du réservoir est, en cours de fouille.
© Christophe Fouquin, Inrap
Canalisation installée à l’intérieur du réservoir est, en cours de fouille.
© Christophe Fouquin, Inrap
En arrière-plan le réservoir, au premier plan un aménagement à l’extérieur du pressoir.
© Christophe Fouquin, Inrap
Les jardins : potager et verger, pour les moines puis pour les patients de l’hôpital
Enfin, quelques éléments du jardin de l’époque Moderne ont été observés au sud de la fouille : fosses de plantation d’arbres, fossés, ainsi qu’un petit puisard maçonné. Le mobilier provenant de ces fosses ainsi que du terrain encaissant est homogène et daté des XVIIe - XVIIIe siècles : on observe un nivellement du terrain grâce à un apport de terre (terreau, compost, rejet de latrine ... ?) dans le but de créer un jardin (potager et/ou verger). La création de ce jardin pourrait être contemporaine du comblement du réservoir nord, signe d’un remaniement complet de cette partie de l’enclos des Chartreux. Quelques vestiges plus récents ont également été mis au jour, car le site a été cultivé jusqu’à la fin du XXe siècle.
Relevés et enregistrement.
© Christophe Fouquin, Inrap
Contrôle scientifique : Service Régional de l’Archéologie (Drac Bourgogne-Franche-Comté)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Stéphanie Morel-Lecornué, Inrap